A Santa Marta, petite île anciennement française avant de devenir anglaise, quelque part sous les tropiques, Sir Templeton, un ancien militaire, convie les principaux notables à un cocktail dans sa résidence. S’y retrouvent tous les représentants des grandes familles de planteurs blancs, les Fleury (de lointaine origine française), les Perkins (britanniques), Mr Romer, un américain directeur de journal, le colonel Carson, le docteur Leishing et divers notables noirs ou métis. Toute cette société bien policée veille soigneusement à ne point se mélanger et pourtant des idylles se forment. Archer, le secrétaire de Templeton s’entiche de Margot. Rien ne va plus entre Mavis et Euan Templeton, le fils du gouverneur dont Jocelyne est tombée amoureuse. La vie semble paisible et agréable sur l’île ensoleillée et pourtant la tragédie n’est pas bien loin.
« Une île au soleil » est considéré comme le chef d’oeuvre d’Alec Waugh, frère aîné beaucoup moins connu qu’Evelyn Waugh. Dans un premier temps, l’auteur s’est attaché à décrire l’ambiance de la haute société des Antilles britanniques quelques années avant qu’elles obtiennent leur indépendance. Les injustices, les inégalités ne manquent pas mais restent à l’arrière plan. Waugh y fait allusion rapidement et préfère s’attarder sur les réceptions, les fêtes, les bals et les amours des « héritiers » blancs (quoique la plupart ait dans leurs veines une part plus ou moins importante de sang noir). Toute cette première partie est assez lente car très descriptive mais non inintéressante. Ensuite le roman bascule dans le drame avec un assassinat qui relève plus de l’accident que du meurtre à proprement parler. Le responsable ne se dénonce pas mais, tel Raskolnikov, reste torturé par la culpabilité laquelle le pousse à une fuite en avant provoquant un nouveau drame… L’ennui, c’est que le style de Waugh a beaucoup vieilli et que la narration manque de rythme et de punch. Le lecteur se retrouve souvent à la limite de l’ennui avec la tentation de lire en diagonale ce qui serait dommage car au-delà d’une intrigue somme toute banale et largement inspirée de « Crime et châtiment » (sans le génie de Dostoïevski), on peut, grâce à ce livre, comprendre les causes de la fracture de la décolonisation et voir apparaître les prémisses de l’antagonisme (pour ne pas dire plus) entre les ethnies et les classes sociales.
3/5
Une île au soleil (Alec Waugh)