« L’enfant allemand », de Camilla Läckberg

Critique de le 30 décembre 2011

Je n‘ai pas aimé...Plutôt déçu...Intéressant...Très bon livre !A lire absolument ! (5 votes, moyenne: 4,00 / 5)
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Roman

Blog: Passion-romans

Les romans scandinaves

Ah les romans scandinaves… Franchement, j’y adhère! Tout a commencé pour moi, comme pour beaucoup de monde, avec la trilogie bien connue des « Millénium », de feu Stieg Larsson. De plus en plus intéressé par ces polars venus du froid, j’ai découvert ensuite quelques romans d’Hakan Nesser, également suédois. Toujours aussi convaincu et charmé, j’ai eu le bonheur total de tomber sur le Maître du roman scandinave, Henning Mankell, avec les aventures du sublime commissaire Kurt Wallander qui, à mon grand regret, a définitivement pris sa retraite.

J’ai alors décidé de traverser la frontière et de me rendre en Norvège pour faire connaissance avec Jo Nesbo, avec ses romans mettant en scène le troublant inspecteur Harry Hole. Pour finir, je me suis encore rendu un peu plus à l’ouest pour me poser en Islande, où j’ai pu découvrir les romans d’Arnaldur Indridason qui, avec sa plume habile, nous livre les enquêtes du commissaire Erlendur Sveinsson. Au sens large du terme, cela reste encore la Scandinavie. (Les puristes me diront que non).

Là, je suis retourné en Suède et j’ai fait connaissance avec un roman de Camilla Läckberg qui n’échappera pas à mon jugement: c’est du bon! Mais pas pour tous les aspects…

Autour du roman

Camilla Läckberg nous offre une intrigue bien construite, mystérieuse et noire, qui va emmener le lecteur au moyen de nombreux flash-back dans l’Histoire de la Suède durant la Seconde Guerre mondiale. Le nazisme prend dans ce roman une proportion dominante et le lecteur devra faire face à des scènes abominables. Et oui, Camilla Läckberg ne nous épargne absolument rien. Durant cette funeste période, il faut savoir que la Suède a passablement été épargnée, au détriment de la Norvège qui a subi les ravages de l’occupation allemande. Cette intrigante histoire cachant bien des secrets nous plonge intégralement dans l’atmosphère sinistre et tragique de cette cruelle période. Le passé refait parfois surface et vous rattrape sans pitié pour des actes que vous avez commis il y a bien longtemps… Je pense que cette phrase résume bien cette oeuvre.

L’auteur a su mettre en scène des personnages bien cadrés, touchants, « vivants » et bien décrits (peut-être même parfois un peu trop). En ce qui concerne l’enquête de police proprement dite menée par nos inspecteurs suédois, elle m’a paru très banale, sans grand intérêt majeur au niveau technique, avec un commissaire très effacé et totalement inefficace. C’est le seul reproche que je fais à Camilla Läckberg, de ne pas avoir creusé un peu plus de ce côté-là, par la subtilité des moyens scientifiques sur la recherche des preuves, de ne pas avoir développé un peu plus les explications sur les recherches d’indices et d’éléments utiles à l’enquête. Merci les coïncidences… Et Heureusement que notre commissaire peut compter sur ses hommes un peu plus malins que lui pour relever ce constat bien décevant. Mais ne vous appuyez pas que sur ce constat, le reste en vaut largement la chandelle!

Avant de vous relater le déroulement principal de l’intrigue – sans toutefois trop vous en dévoiler – je vais relever des aspects « secondaires » très pertinents, en retrait de la trame principale, qui donnent à ce roman un « plus » majeur pour le lecteur. Nous allons en savoir davantage sur les problèmes de société en Suède ainsi que des remises en question fondamentales que Camilla Läckberg a jugé utile de mettre en exergue dans son roman.

Comme je vous l’ai dit, l’auteur lâche par moment la trame principale au profit de faits secondaires non négligeables. Certains lecteurs trouveront cela superflu mais j’estime pour ma part que ça donne une consistance au roman, une densité bien maîtrisée. Camilla Läckberg relève certains aspects de la société, tels que le congé-paternité, l’adoption, être parents pour un couple homosexuel, la crise d’adolescence, les familles recomposées et le racisme. Aux travers des personnages évoluant dans ce roman, respectivement aux travers de familles tout à fait banales, nous sommes confrontés à tous ces faits de société avant que l’auteur nous replonge sans ménagement dans la noirceur et la réalité de l’intrigue principale, entre le présent et le passé. Une maîtrise totale. Le passé…

« A côté de lui, un prisonnier s’éffondra. Aussi maigre, aussi sous-alimenté qu’Axel, il s’affaissa, à bout de forces, sans parvenir à se relever. Axel envisagea d’aller l’aider, mais ce genre de pensées ne trouvait plus d’accroche dans son cerveau, ne menait jamais à une action. Car désormais, c’était une question de survie. Le peu d’énergie qu’ils avaient encore ne servait qu’à cela… Non, il fallait discrètement essayer de se tenir au milieu de la foule et garder la tête baissée quand une dispute se préparait. C’est pourquoi Axel ne réagit pas en voyant le gardien approcher du prisonnier à terre, le prendre par le bras et le tirer vers la fosse, le traîner vers le centre où ils avaient fini de creuser et où elle était la plus profonde… Inutile de gâcher une balle pour lui… On le recouvrirait tout simplement de cadavres. Et s’il n’est pas déjà mort, il finira par étouffer. »

L’auteur nous sensibilise aussi sur un aspect fondamental, le bien et le mal. Est-ce que l’on peut se focaliser sur le fait que tout est noir ou blanc. Ou alors peut-on admettre que bien des nuances se situent entre ces deux extrémités. La question se posera au fil du roman, concernant des situations pourtant dures, extrêmes et profondes, voir violentes. Je ne vous en dis pas plus.

L’histoire

Erica Falck, écrivain et mère d’une petite Maya âgée d’une année, vit dans une petite ville suédoise avec son mari Patrik, inspecteur de police en plein congé paternité. Un jour, Erica découvre dans leur grenier, au fond d’une malle, des affaires ayant appartenu à sa mère Elsy, accidentellement décédée quelques années auparavant. Elsy était une mère distante et froide et c’est pour cette raison qu’Erica compte sur certains souvenirs pour tenter de mieux la connaître. Ce qu’Erica va découvrir au fond de cette malle va totalement la déconcerter. Des journaux intimes de sa mère, une petite brassière ensanglantée recouvrant une médaille ornée d’une croix gammée.

Erica, avec l’aide de son mari, va mettre toute son énergie et consacrer tout son temps pour savoir pourquoi ces objets se sont retrouvés là et mettre à jour les secrets qui se cachent derrière cette découverte. Elle va entrer en contact avec un historien à la retraite à qui elle va remettre la médaille nazie pour qu’il lui en apprenne la provenance. Deux jours plus tard, cet homme est sauvagement assassiné dans son salon. Une première mort violente…

Erica va donc s’immerger dans les journaux intimes de sa mère, faire un saut dans le temps et par la même occasion nous emmener avec elle dans la période de la Seconde Guerre mondiale. Elle va petit à petit remarquer qu’il s’est produit des choses surprenantes dans le passé de sa mère et va surtout s’apercevoir que cette femme – jeune fille à l’époque –  ne semblait pas être comme elle l’a connue, distante, malheureuse et sans amour. Que s’est-il passé pour qu’elle change à ce point?

A travers les recherches d’Erica sur le passé de sa mère et en suivant l’enquête de la police sur le meurtre du vieil historien, nous allons avec elle assembler les pièces d’un puzzle dévoilant petit à petit une image marquée par les abominations de l’époque nazie. Erica, en cherchant des réponses sur sa mère, a peut-être ravivé des souvenirs profondément enfouis qui n’auraient jamais dus être ébranlés. Peut-être…

Certaines personnes appartenant à ce passé et qui évoluent encore autour d’Erica Falck vont devoir se remettre en question, assumer leurs actes, salement rattrapées par le temps. Des regrets?

Que s’est-il passé il y a 60 ans? Pourquoi la mère d’Erica est-elle au centre de tout ceci? Des camps de concentration, en passant par les réseaux de la résistance et les groupuscules néo-nazis, le lecteur va affronter la noirceur de l’Histoire, en étant confronté au racisme et aux cerveaux maléfiques et pollués de l’être humain. Mais aussi à l’amour, à l’amitié solide et sincère qui permet de survivre et faire face à une période qui, j’espère, restera derrière nous.

Je vous laisse avec des propos tenus par un des personnages, propos tellement vrais:

 » Je pense que c’est fait exprès, dit Frans en regardant la mer. Si on avait une boule de cristal qui nous montrait tout ce qu’on allait vivre dans sa vie, on n’aurait sans doute pas la force de se lever le matin. L’objectif est probablement qu’on reçoive la vie par portions. Qu’on reçoive les chagrins et les problèmes par morceaux juste assez gros pour pouvoir les avaler. » 

« L’enfant allemand », de Camilla Läckberg

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