Voici en quelques mots la trame du roman de José Saramago, Les intermittences de la mort (Points, 2009).
Le 1er janvier d’une nouvelle année inconnue, dans un pays tout aussi inconnu, les gens arrêtent brusquement de mourir. Ils ne rajeunissent pas, ni ne guérissent mais ils ne meurent plus. Tout simplement. Les personnes à l’agonie restent en suspens, comme si elles refusaient de franchir la frontière qui les séparent de l’enfer, du purgatoire ou du paradis.
Se posent alors de nombreux problèmes pratiques: hôpitaux surchargés, maisons de retraites bondées (et oui le turn-over habituel possible uniquement grâce aux décés est en panne), assurances effrayées par la faillite, surpopulation, vieillssement infini…Pour la population, cette grève de la mort est vécue soit comme un fardeau (pour les suicidaires et les mourants) soit comme une bénédiction.
L’Etat, tout comme l’Eglise menacée de disparition, décident alors d’intervenir et n’hésitent pas à utiliser des moyens illégaux et peu orthodoxes pour rassurer la population et protéger leurs propres intérêts.
Alors que tout le monde se fait peu à peu à l’idée de la vie éternelle, la mort décide de reprendre ses droits, sans crier gare. Ne s’agissait-il que d’une trève? La mort se jouerait-elle des simples et faibles vivants que nous sommes?
En faisant de la mort un personnage à part entière qui peut faire preuve de réflexions, de susceptibilité et de sens pratique, José Sarramago donne à la mort un nouveau visage, un visage presque humain, qui la rend réellement attachante aux yeux du lecteur. En utilisant le point de vue de la mort comme point de vue narratif principal, l’auteur nous pousse à prendre du recul, à nous moquer de nous-même et à réfléchir à cette angoisse si propre à l’humanité: la peur de mourir.
Avec humour, cynisme et virtuosité, l’écrivain se joue des politiques, des philospohes, des religieux et des petites gens qui, en réalité, ont tous besoin de la mort, à différents degrés.
José Sarramago remet ainsi en cause plus de 2000 ans de civilisation judéo-chrétienne, qui a basé toute sa foi sur le culte de la résurrection et dont l’Eglise a basé son pouvoir et son influence sur la vie après la mort ou l’absolution des péchés avant le dernier soupir.
Sarramago dresse un portrait intransigeant de la condition humaine qui, comme à son habitude, ne peut se satisfaire de ce qui lui est offert, même s’il s’agit là de la vie éternelle. Iune grande virtuoisté linguistique.
Et si la mort se mettait à son tour en grève?
Cet ouvrage m’a davantage paru comme étant un monologue intérieur vide de sens. Le thème était pourtant intéressant. Pour s’accrocher aux mots il faut vraiment être détaché de tout intérêt. J’ai aussi été destabilisée par la syntaxe: un champ de mines et de désoeuvrement littéraire. A revoir. L’auteur s’est-il relu ou joue-t-il sur sa « popularité » ou sur sa popu-nullité?