Comment devient-on, à un âge où ses contemporains ont déjà bien entamé leur vie d’adulte, avec plan épargne logement et certitude d’avoir sa place dans la société comme au parking, comment devient-on, donc, un Conchito ?
Ce roman est celui d’un encore jeune homme, doué pour tout et surtout pour rien, qui fait son petit trou, sans faire de vagues, à coups d’aspirateur.
Ses talents d’homme de ménage ne seraient pas aussi reconnus de ses dames s’il ne les exerçait dans le plus simple appareil.
La nudité bien faite, cela ne s’improvise pas, mais s’acquiert.
Pourtant la nudité est-elle encore un tabou aujourd’hui, quand tout le monde s’y essaye avec des ricanements blasés ? La “pureté édénique” est-elle devenue une douce utopie ?
L’angélisme de Conchito sera mis à mal lorsqu’il tombera peu à peu sous la coupe de Valéry, dont le cynisme réaliste est plus conforme au monde qui les entoure.
Revers cruels pour notre ami, qui doit faire face à une non moins redoutable expérience : son sexe, son instrument de travail, donc, se met à rétrécir au fil des jours, malgré ses efforts dans toutes les directions pour arrêter cette malédiction qui l’entraîne au fond de l’eau.
Le puritain candide qu’est Patrick-Conchito se trouve confronté au cynisme ambiant et, plongé tout nu dans la foire au sexe et au statut social, se recroqueville en lui-même dans l’indifférence générale.
Sous ses apparences triviales, le roman est très drôle, et touchant à la fois. Et, s’il est parfois un peu leste dans son vocabulaire, il évite toujours la vulgarité. À mettre entre toutes les mains à partir de l’adolescence – surtout celles des garçons qui retrouveront certainement une part de leurs doutes dans leur identité « virile ».
« Conchito », de Pascal Juan (Presque Lune)
Critique de Synoptic le 26 décembre 2014
Roman