Armando Valladares qui a passé 22 années de sa vie dans les prisons, les camps de concentration et les camps de travaux forcés du régime Totalitaire Communiste Castriste à Cuba, commence ainsi son effroyable témoignage, publié en 1985 :
(Page 7) :
« A la mémoire de mes compagnons torturés et assassinés dans les prisons de Fidel Castro et aux milliers de prisonniers qui y agonisent actuellement ».
(Page 9) :
« L’homme est l’être merveilleux de la Nature. Le torturer, le détruire, l’exterminer pour ses idées est plus qu’une violation des droits de l’homme ; c’est un crime contre l’Humanité ».
Dans la nuit du 28 décembre 1960, Armando Valladares fut donc arrêté arbitrairement par la Police Politique Castriste, un an seulement, après le coup d’État militaire perpétré par les frères Castro, Fidel et Raul, ainsi qu’Ernesto Guevara (surnommé le Che).
Armando Valladares introduit son témoignage en prévenant l’Humanité tout entière…, mais en vain… (page 11) :
« Dans mon pays, il y a quelque chose que les défenseurs les plus fervents de la révolution cubaine ne peuvent nier : c’est le fait d’une dictature qui existe depuis plus d’un quart de siècle. Or un dictateur ne peut se maintenir au pouvoir pendant autant de temps sans violer les Droits de l’Homme, sans persécutions, sans détenus politiques et sans prisons.
En ce moment, il y a à Cuba plus de deux cents établissements pénitentiaires, depuis les prisons de haute sécurité et les camps de concentration jusqu’à ce qu’on appelle là-bas les granges et les fronts « ouverts », où les prisonniers sont condamnés aux travaux forcés.
Dans chacune de ces deux cents prisons, il s’est passé et se passe assez de choses pour écrire de nombreux livres. Aussi le témoignage que voici est-il à peine une esquisse de leur terrible réalité.
Un jour viendra où l’on connaîtra leur histoire dans ses détails, et l’humanité sera frappée d’horreur comme elle le fut en découvrant les crimes de Staline. »
Armando Valladares fut arrêté, interrogé et emprisonné sur le simple fait de ne pas être Communiste. Dès lors, la population Cubaine allait subir les affres terribles de l’adhésion de Fidel Castro à l’Idéologie Marxiste-Léniniste du Communisme (Page 17) :
« Ce fut ainsi que les révolutionnaires qui gardaient envers et contre tout l’espoir de voir Fidel Castro mettre fin à l’emprise croissante des communistes se trouvèrent incapables d’admettre, tant que le gouvernement ne proclama pas ouvertement son attachement au marxisme, que les expropriations forcées, les confiscations de terres, les nationalisations, le transfert à l’État des moyens de production appartenant aux particuliers, les exécutions et les exhortations constantes à la haine ainsi que la glorification de la lutte des classes n’étaient, sans contredit possible, que des applications pratiques de la doctrine communiste. »
A Cuba, la Police Politique se nomme la Sûreté de l’État. Elle est l’équivalent de la Tcheka (futur N.K.V.D. puis K.G.B.) Soviétique. La Police Politique décida donc, une nuit, de perquisitionner le domicile d’Armando Valladares. Il fut ensuite conduit au siège de la Sûreté de L’État, le Complexe G-2 (toujours l’équivalent du siège de la Tcheka Soviétique : la Loubianka), 14 rue Cinquième Avenue dans le quartier de Miramar.
Interrogé dans la foulée de son arrestation, on l’accusa, sans aucun fondement, d’être : un « ennemi du peuple », « un contre-révolutionnaire » et, summum de l’infamie, d’avoir fait ses « études dans une école religieuse ». Il s’agit des classiques accusations des bourreaux de l’univers Totalitaire Communiste, leur permettant d’enfermer ou d’exécuter n’importe qui, sans raisons… !
Armando Valladares fut emmené à la Cabana, la prison principale pour prisonniers politiques de l’île (page 23) :
« Après la victoire de la révolution, elle était devenue une prison pour politiques, et les exécutions se succédaient dans ses fossés. Elle s’élève sur une colline de l’autre côté de la baie et est toutefois isolée, entourée de vastes terrains d’exercice et de polygones de tir : c’est là que se trouvait autrefois l’école d’artillerie. »
Dès lors, les horribles exécutions sommaires s’enchaînèrent (pages 25 et 26) :
« Un grand escalier descendait jusque dans le fossé. Là, à un mètre du mur, il y avait un poteau de bois où on l’a attaché. Avant, Julio avait serré la main à chacun des gardes qui composaient le peloton d’exécution en leur disant qu’il leur pardonnait.
– PELOTON, GARDE A VOUS ! EN JOUE… ! FEU !
– A BAS LE COMMU… !
Le cri de Julio Antonio Yebra s’interrompit à jamais. Il n’y avait pas eu de salve véritable, mais des coups de feu qui s’engrenaient en désordre. Puis une détonation sèche, celle du coup de grâce derrière l’oreille. Jamais je n’oublierai ce claquement isolé, mortel.
Dans la prison, le silence était pesant, dramatique. Nous avons ensuite écouté les chocs des marteaux qui clouaient le couvercle de l’humble cercueil en bois de pin. »
Parmi les innombrables suppliciés, de nombreux courageux criaient des slogans contre le régime Totalitaire Communiste, avant d’être fusillés. Désormais, pour les faire taire définitivement avant leur assassinat, les victimes furent bâillonnées avant les exécutions (pages 28, 30 et 31) :
« Dès 1963, les condamnés à mort descendirent bâillonnés au supplice. Nos geôliers avaient peur de ces cris. Ils ne pouvaient tolérer une dernière exclamation virile de la part de ceux qui allaient mourir. Ce geste de rébellion, de défi, dans un instant suprême, cette manifestation de courage et de détermination à l’instant qui précédait la mort pouvait être un mauvais exemple pour les soldats : un exemple qui les ferait réfléchir.
(…) Avec ces fusillades, la prison de la Cabana était devenue la plus terrible de toutes, et pour nous tenir sous la terreur, les gardes commencèrent à perquisitionner dès l’aube. Leurs pelotons, armés de gourdins, de chaînes, de baïonnettes et de tout ce qui pouvait servir à nous battre, faisaient irruption dans les galeras en criant et en frappant au hasard, sans ménagement.
(…) Chaque matin, la Cabana se réveillait en se posant la même question : « Qui vont-ils fusiller aujourd’hui ? ».
Puis Armando Valladares fut transféré ailleurs, comprenant qu’il risquait d’être fusillé n’importe quand (pages 32, 33 et 37) :
« Une petite pluie fine commença à tomber. Nous avons traversé les fossés, laissant la prison derrière nous. J’ai tourné la tête. J’ai vu pour la dernière fois la vieille muraille moisie et les grilles des galeries ; à ma gauche, c’était le fossé des exécutions : le madrier où l’on attachait les condamnés, et derrière lui, le mur garni de sacs de sable dont certains étaient troués par les balles qui traversaient les corps des fusillés. Au pied du poteau, parmi les taches de sang, des poules picoraient, peut-être, les restes de la cervelle d’un supplicié de la nuit. Le Yankee qui commandait la garnison se faisait accompagner lors des exécutions par un chien qui léchait le sang des cadavres.
(…) Le 21 janvier [1960] exactement, Castro devait déclarer :
– Les sbires que nous sommes en train de fusiller ne seront pas plus de quatre cents, mais beaucoup plus nombreux sont ceux qui sont déjà tombés face aux pelotons [d’exécution] pendant ces jours de barbarie et de mort.
Le 12 janvier, sur le champ de tir situé dans une petite vallée dite de San Juan, à l’extrémité de l’île, dans la province d’Oriente, des centaines de soldats de l’armée vaincue de Batista durent s’agenouiller dans une fosse de plus de cinquante mètres de long, les mains liées derrière le dos, avant d’y être abattus à la mitrailleuse. Puis on combla la fosse au bulldozer. Tout cela sans même un jugement. Beaucoup de ces soldats étaient des adolescents entrés dans l’armée pour des raisons économiques. Ce massacre fut ordonné par Raul Castro, qui y assista en personne. Et ce ne fut pas là un cas isolé. D’autres officiers des guérilleros de Castro fusillèrent en masse les ex-soldats de l’armée, sans jugement, sans qu’il existât contre eux la moindre charge, dans une série d’opérations de simples représailles contre les vaincus. »
Armando Valladares nous fait, encore et encore, vivre l’effroi du processus d’exécution qui le traumatisait chaque nuit, attendant l’insondable angoisse de la mort, à chaque instant, dans l’indifférence générale et l’anonymat (page 43) :
« Et nous frémissions à l’idée que ce peloton pourrait venir pour nous. Je me voyais les mains liées, bâillonné, conduit au fossé… Je descends ces marches, des projecteurs éclairent le poteau planté devant le mur de sacs de sable… des gardiens me poussent en avant, une corde me lie la taille au poteau… les fusils se lèvent et c’est un éclair, un bruit assourdissant retentit dans les fossés… Voilà ce qui pouvait m’arriver et je m’y attendais. Toutes les nuits, j’ai suivi ce chemin, je le voyais les yeux fermés, j’en connaissais par cœur le tracé, chaque marche, le poteau de bois…
Après le coup de grâce, il y avait toujours parmi nous quelqu’un pour sangloter. Nous entendions grincer la grille de l’entrée, et l’un de nous s’avançait jusqu’à la porte pour voir son ami et lui crier un ultime adieu. Nous ne pouvions plus nous rendormir.
Nulle part, il n’y avait un atome de respect pour les condamnés. Si l’homme qui marchait à la mort n’avançait pas à la vitesse exigée par les gardiens, ils le faisaient avancer à coups de crosse, ou ils le traînaient à terre comme un colis avant de le lier au poteau.
L’écho répercute dans les fossés le bruit des marteaux qui clouaient le cercueil de bois. On ne livre jamais le cadavre à ses proches pour qu’ils puissent le veiller et l’accompagner au cimetière. Un petit fourgon aux initiales de l’I.N.R.A. (Instituto nacional de reforma agraria) et où se trouvent déjà un membre de la Police politique et plusieurs soldats l’emporte jusqu’à l’une des fosses communes à l’intérieur d’une parcelle réservée à cet effet par le ministre de l’Intérieur dans le cimetière de Colon. Pas un indice, pas une pancarte, rien n’identifie le mort. Les membres de sa famille n’ont même pas le privilège de connaître l’endroit où l’on a enterré celui qu’ils chérissaient. »
La prison de la Cabana étant surchargée de prisonniers, Armando Valladares, avec des centaines d’autres prisonniers, fut transféré dans l’effroyable et gigantesque bagne de l’île des Pins (pages 53 et 57) :
« Nous avions tous entendu parler des horreurs du bagne qui était notre destination : travaux forcés dans les carrières, inspections dont le nom seul faisait frémir car chaque fois quelques prisonniers mouraient et des centaines d’autres en sortaient blessés à coups de baïonnette. Nous étions tous renseignés sur les quartiers spéciaux et les cellules où l’on enfermait quiconque osait protester contre les injustices et les abus de pouvoir dont il était victime, ou simplement parce qu’un geôlier prenait plaisir à voir un malheureux complètement nu, couché à même le sol dur et froid et à pouvoir refermer sur lui une porte que l’on soudait pour n’avoir plus à l’ouvrir. Ces malheureux passaient là plusieurs mois de suite, et leurs gardiens avaient l’habitude de les arroser quotidiennement d’eau glacée et d’excréments. Celui qui parvenait à garder le contrôle de son esprit et qui ne sortait pas de là diminué mentalement n’en était pas moins atteint à mort de tuberculose, les poumons détruits…
(…) A coups de baïonnette dans les fesses, les gardiens les obligeaient à augmenter sans cesse l’allure. Nous les avons vu s’éloigner. Déjà, le sang ruisselait le long de leurs cuisses, teignait de sombre leur pantalon. L’un d’eux trébucha, tomba. Les gardiens le piétinèrent de leurs lourdes bottes jusqu’à ce qu’il perdît connaissance dans une mare de sang. Ils l’enlevèrent de là en le traînant par les bras. Nous devions apprendre par la suite que c’était là une des distractions favorites de nos matons. Pour nous, sur le moment, ce spectacle avait quelque chose de dantesque. Nous n’imaginions pas encore que nous assisterions fréquemment, depuis nos cellules, à cette manière d’accueillir ceux qui débarquaient dans l’île. »
Régulièrement, des exécutions publiques étaient organisées en pleine ville (pages 83 et 84) :
« Si les condamnés à mort étaient fusillés dans des forteresses, des casernes ou d’autres lieux qui convenaient mieux à des exécutions capitales, seul un petit nombre de personnes était alors au courant ; les familles elles-mêmes, terrorisées, essayaient de dissimuler qu’on venait de fusiller l’un des leurs pour ne pas attirer sur elles encore plus de persécutions, de représailles et d’hostilités acharnées. L’objectif de la Police politique était de transformer chaque exécution en châtiment exemplaire. Il fallait donc que tous fussent au courant pour se convaincre qu’on fusillait tout opposant à la révolution. Ces exécutions publiques n’avaient qu’un objectif : répandre la terreur dans la population.
Dans le village choisi, on élevait dans le parc central [A Cuba, le parc central est la place principale, plantée d’arbres, de la localité. (N.d.T.)] un mur de sacs de sable et un poteau : on improvisait ainsi un paredon. On prévenait les organismes des masses. La Police politique, dont les membres étaient toujours en civil, se chargeait d’ameuter la foule. Ces hommes se répandaient par les rues, invitant tout le monde à assister à l’exécution publique d’un criminel : les comités de défense de la Révolution avaient pour mission d’amener sur place le plus grand nombre possible d’habitants, y compris les enfants. S’abstenir, c’était montrer qu’on était contre le gouvernement, et la police interprétait cette absence comme la preuve de la sympathie qu’on avait pour le condamné à mort. Ces foules s’assemblaient donc sur le lieu du supplice en criant : « Paredon ! Viva Fidel ! »
Beaucoup ne savaient même pas quel était le fusillé ni pourquoi il fallait le tuer. Ce fut le cas d’une femme du village de Santiago de las Vegas, proche de La Havane ; en arrivant au parc central, elle apprit avec horreur qu’elle réclamait la mort de son propre fils.
Le condamné était conduit au parc les mains attachées dans le dos. Un membre de la section régionale du parti prononçait un discours menaçant, dirigé contre tous. Il commençait par une apologie de la révolution et tonnait contre les ennemis du peuple, vendus à l’impérialisme yankee, en insistant sur le fait que la justice révolutionnaire serait implacable contre ceux qui trahiraient la classe ouvrière. Puis on procédait à l’exécution en présence de tous. »
Dans cette horrible prison de l’île des Pins, les conditions, d’un point de vue sanitaire, étaient innommables (pages 84 et 85) :
« Sans installation sanitaire dans les cellules et sans eau courante, nous devions utiliser nécessairement les services des étages ; les cuvettes des W.-C. s’y trouvaient encore, mais s’en servir était indescriptiblement répugnant. Les excréments en débordaient. Les portes ayant disparu elles aussi, rien ne les avait remplacées, aucun rideau n’isolait l’utilisateur ni ne le séparait, même partiellement, de la longue queue de ceux qui attendaient leur tour. Il fallait déféquer dans ces conditions, comme si l’on se trouvait en pleine rue, en plein midi. De plus, le fait de placer les pieds sur le rebord de la cuvette constituait à lui seul un grand danger pour l’intéressé : il lui arrivait sans cesse de glisser d’un pied et de se retrouver enfoncé jusqu’à mi-jambe dans un marécage d’excréments.
(…) A chaque débordement d’excréments, il fallait intervenir avec des pelles et des seaux. Dans toute société ou dans tout groupe humains, il y a toujours des hommes qui acceptent les tâches les plus désagréables. Ceux d’entre nous qui se chargeaient d’évacuer les excréments méritaient une admiration et une reconnaissance sans bornes. Mais que pouvaient-ils faire, sinon les déverser de tous les étages dans la cour intérieure, pour les entasser en un monticule de quatre à cinq mètres de diamètre, sur lequel pullulaient des millions de mouches ? D’en haut, on aurait cru que cette montagne se mouvait, couverte qu’elle était constamment par une carapace d’insectes. Quand on s’approchait, cet essaim se soulevait comme une nuée noire. La puanteur était insupportable et empestait toute la circulaire. Pour nous déplacer, nous recherchions le côté d’où soufflait le vent et où il y avait un peu d’air pur et respirable. Le soir ou à l’heure des repas, si, au hasard d’une saute de vent, cette fétidité déferlait sur nous, il nous arrivait d’en vomir.
(…) Le risque de maladies et d’épidémies était grand, et nous prenions toutes les mesures possibles contre leur propagation, spécialement à l’égard de l’hépatite virale que nous transmettaient les mouches. Nous gardions nos assiettes et nos couverts dans des sacs de plastique et nous nous efforcions de ne laisser à leur portée aucun récipient, aucun aliment. Même avec ces précautions, il y avait des épidémies, des morts à la suite de typhoïdes. Les cas de diarrhées, de vomissements et d’infections intestinales étaient fréquents et se succédaient sans arrêt ».
Très intelligemment, Armando Valladares analyse les modes de fonctionnement des gardiens vis-à-vis des prisonniers. Ces bourreaux devaient être à la fois, extrêmement conditionnés, et, devaient déshumaniser les prisonniers pour pouvoir s’autoriser à agir de manières aussi ignobles avec eux (page 86) :
« Les gardiens criaient comme toujours ; c’était chez eux un mécanisme grâce auquel ils s’enhardissaient, s’excitaient. Il n’est probablement pas simple, même pour des êtres totalement inhumains, de frapper d’autres hommes sans raison valable, sans motif. Ces gardiens étaient mariés, ils avaient des enfants. Certains vivaient dans des petites maisons situées à la sortie du pénitencier. Ils arrivaient sur place, sortant de la chaleur du foyer, engourdis encore de sommeil, et on leur distribuait des baïonnettes, des chaînes et des bâtons pour qu’ils attaquent des hommes avec qui ils n’avaient échangé ni un cri, ni une injure. Que ressentaient-ils donc quand ils voyaient les premiers prisonniers apparaître à la grille, pleins d’effroi, et quand ils devaient lever leur baïonnette et l’abattre sur eux ? Je pense que pour accomplir un tel acte, un être humain doit justifier ce qu’il fait, s’inventer une motivation intérieure, et quand il ne la trouve pas normalement, la rechercher dans une soûlerie de cris et d’insultes. Certes, il existe des criminels-nés, des individus chez qui frapper n’importe qui suscite un plaisir sadique. Après avoir passé la grille, les prisonniers poursuivaient leur course entre deux files de gardiens qui assénaient leurs coups au hasard. »
C’est lors de la tentative ratée de débarquement de la baie des Cochons, le 17 avril 1961, par des exilés cubains anti-Castristes aidés par les Américains, que Fidel Castro tomba le masque en revendiquant ouvertement son adhésion au Communisme (pages 103 et 104) :
« Dès lors, Castro, qui avait proclamé tant de fois qu’il n’était pas communiste et que la révolution, loin d’être rouge, « était plus verte que les palmes », jeta définitivement le masque qui lui avait permis de tromper une majorité de Cubains : il reconnut ouvertement la vraie nature de sa révolution, celle qu’elle avait eue depuis toujours :
– Cette révolution est une révolution socialiste… et nous la défendrons avec nos fusils…
Et il termina son discours en utilisant une phraséologie communiste qui ne pouvait plus laisser aucun doute sur ses objectifs :
– Vive la classe ouvrière ! Vive la paysannerie ! Vive les indigents ! Vive la Révolution socialiste ! La patrie ou la mort ! Nous vaincrons !
Ces phrases démagogiques, nous les avions entendues et nous les entendons encore chez ceux qui sont les vrais tyrans des ouvriers et qui leur promettent la liberté pour mieux les enchaîner. »
Afin de tenter de circonscrire l’opposition dans l’île, durant l’épisode de la baie des Cochons, la répression s’intensifia encore davantage (pages 104 et 105) :
« Dans la cour de la Cabana, par exemple, les autorités entassèrent des centaines de personnes, y compris des femmes avec leurs enfants. Et comme cela ne suffisait pas, on fit descendre ces malheureux dans les fossés où ils demeurèrent dans une promiscuité effroyable, entourés de mitrailleuses braquées sur eux. Le seul fossé demeuré libre fut celui des exécutions, là ou se trouvait le Paredon, le Mur des fusillés.
(…) Dans les fossés du Castillo del Morro, des milliers de Cubains anonymes demeurèrent, pendant ces deux jours de crise, sans manger ni boire. Finalement, les autorités, pour calmer la soif de ces malheureux, leur firent parvenir un peu d’eau au moyen d’un tuyau d’arrosage.
Des dizaines de personnes moururent ainsi entassées. Des femmes enceintes avortèrent et d’autres mirent leurs bébés au monde, assistées par les femmes les plus proches, au milieu d’une cohue indescriptible. Leur état n’empêchait pas les gardiens de les menacer, de leur dire qu’elles seraient fusillées comme les autres si l’invasion triomphait.
Le théâtre Blanquita, le plus grand de tout Cuba, devint ainsi un gigantesque pénitencier où se pressèrent plus de huit mille personnes. Leur détention arbitraire dans ces véritables camps de concentration dura cinq jours au cours desquels il n’y eut que quatre distributions de vivre.
On ne connaît pas le nombre des meurtres qui se commirent alors dans toute l’île, mais les pelotons d’exécution fonctionnèrent à Pinar del Rio, à la base de San Antonio de los Banos, à la Cabana, au Castillo de San Severino, à Matanzas, La Campana, Camagüey, et dans la province d’Oriente. Les bourreaux ne prirent même pas la peine de mettre les cadavres dans des cercueils, mais dans de simples sacs plastiques. »
Comme sous tous les régimes et systèmes Totalitaires, humiliations et tortures vont de pair : passages à tabac, projections d’urine et d’excréments sur les prisonniers, morsures de rats, invasions d’insectes tels que punaises, poux, cafards, etc. (pages 187, 188 et 189) :
« Nos gardiens continuaient à vider sur nous des tinettes d’urine et d’excréments. L’hiver était rude cette année-là, et ils choisissaient l’heure la plus froide, celle du lever du jour, pour nous arroser d’eau glacée. La sensation était désagréable, certes, mais cela nous permettait de débarrasser le sol de nos cellules des excréments qui s’y incrustaient.
Peu à peu, le trou qui servait à chacun de nous de latrines s’était rempli, bouché, faute d’eau. A la nuit tombante, les cafards commençaient à parcourir le sol et les murs, et leurs cavalcades sur mon corps me réveillaient en sursaut.
(…) Ce fut ainsi qu’un jour, le rat a pu entrer dans ma cellule sans me réveiller. Comme dans toutes les prisons, les rats pullulaient, affamés. Ils parvenaient à s’introduire dans nos cachots jusque par les latrines dont la tuyauterie n’était pas bouchée.
L’immobilité de mon corps a dû le rassurer. Toutes les bêtes nuisibles ont un instinct qui les avertit qu’elle peuvent approcher sans danger d’un homme ou d’un animal qui dort. Je ne sais s’il a senti d’abord mes pieds qui étaient les plus proches de la porte, mais il s’est glissé de toute façon jusqu’à mes mains où il s’est mis à me ronger avidement un doigt. J’étais tellement épuisé que je ne me suis pas réveillé. Quelque chose l’a sans doute effrayé momentanément, un mouvement inconscient de ma part peut-être, car il s’est éloigné un instant, mais pour revenir aussitôt à l’attaque.
(…) Il ne me restait qu’à utiliser le vieux remède des paysans : désinfecter ces blessures sous un jet d’urine. Quelques jours plus tard, une croûte épaisse d’où sortait un peu de pus les recouvrait déjà ».
Les conditions d’hygiènes étaient effroyables (pages 192 et 193) :
« Après plusieurs semaines sans pouvoir me laver, mon corps s’est couvert d’une couche de graisse noirâtre accompagnée de démangeaisons aux aisselles, aux organes sexuels et à la tête, où une éruption de petits boutons durs avait envahi tout le cuir chevelu.
La saleté est le terrain idéal pour les minuscules champignons qui commencèrent à proliférer, d’abord aux pieds, puis aux jambes, aux aines, et ensuite sur tout le corps. C’est aux testicules que les démangeaisons devinrent le plus insupportables.
Nos gardiens ne nous donnaient de l’eau dans une petite boîte de fer-blanc que deux fois par jour, aux heures du déjeuner et du dîner. Pour obtenir un supplément entre les repas ou à d’autres moments, il fallait les appeler et les rappeler, crier, déclencher un véritable scandale. Cela ne réussissait pas toujours, mais nous parvenions parfois à avoir le petit supplément désiré.
Mon grand souci était de ne pas attraper d’hépatite virale. Je connaissais les dangers que pouvaient entraîner le manque de toute hygiène, l’accumulation des matières fécales dans le coin où se trouvait la latrine bouchée et d’où des centaines de petits vers visqueux montaient à l’assaut des murs ou rampaient sur le sol du cachot.
(…) Comme je ne voulais pas prendre les macaronis, le pain ou la farine avec des doigts souillés, pleins d’excréments, je soulevais mon assiette par le fond, prenais le bord entre mes lèvres et, par petites secousses, je parvenais à faire basculer son contenu dans ma bouche. Je mangeais donc comme un chien, en plongeant mon museau dans mon assiette. Matériellement, j’étais réduit à un état sous-humain. J’étais devenu plus animal qu’homme. Et seule, mon imagination me sauvait de cette bestialité : je m’inventais des mondes intérieurs que j’enrichissais par une série de procédés étranges : je fermais les yeux, et je voyais apparaître de la lumière, de l’air, j’imaginais des soleils inextinguibles, des horizons que ne pouvait limiter aucun barbelé, des ciels changeants, des étoiles, des fleurs et tous les bruits agréables que j’arrachais à l’oubli : le chant des oiseaux, le fracas des vagues contre les rochers, le bruissement des branches d’un arbre. Dans les ténèbres de ce recoin immonde, il me suffisait de fermer les yeux pour ressusciter le miracle biblique. Je n’avais même pas besoin de dire : « Que la lumière soit ! » Elle était. Elle était là, en moi. Et dans ce monde qui n’était qu’à moi, j’étais hors d’atteinte de mes geôliers, je me sentais libre, je pouvais marcher dans les prés, sur les rivages, j’habitais un univers secret où ma foi religieuse se conjuguait avec mon imagination et mes souvenirs ».
Jusqu’au jour où son état de délabrement physique était tel, que ses compagnons de cellule firent en sorte qu’il soit hospitalisé (page 199) :
« Les colonies de champignons continuaient à gagner du terrain sur l’ensemble de mon corps, et ma grande peur était qu’elles n’envahissent mes yeux. Pour me soulager, je disposais seulement des applications de pâte dentifrice dont j’ai déjà parlé.
C’est alors que j’ai contracté une infection intestinale accompagnée de fièvre et de diarrhées constantes qui me déshydrataient complètement. L’eau était toujours rationnée, et nous ne nous étions pas lavés depuis des mois. Une crasse noirâtre s’accumulait de plus en plus sur mon corps. J’avais à peine la force de parler, mais mes compagnons se mirent à exiger qu’on me soigne, et cela avec une telle insistance qu’on me transporta finalement à l’hôpital. »
Pendant ce temps, à la Cabana, le rythme des exécutions par fusillades, s’amplifiait toujours davantage… (pages 216 et 217) :
« 1962 fut pour Cuba une année importante, riche en événements. Tout le monde se souvient de la crise déclenchée par l’installation dans l’île des fusées soviétiques, ce qui provoqua presque une troisième guerre mondiale. De plus, la Police politique découvrit un complot militaire à l’échelle nationale, dont le but était de renverser le gouvernement.
Ce complot avait des ramifications dans l’armée de terre, la marine de guerre et aussi dans la police. La réaction du gouvernement fut de répondre à cette conspiration par un véritable bain de sang. Par dizaines, les militaires arrêtés et conduits dans les prisons de la Cabana et du Castillo del Morro furent fusillés sans jugement, uniquement sur ordre du haut commandement de la Police politique.
La Cabana connut alors ses nuits les plus horribles.
A la suite de cette conspiration connue dans les prisons cubaines par la date de sa découverte, le 30 août 1962, le gouvernement fit fusiller quatre cent soixante militaires dans toute l’île. »
Bien évidemment, à Cuba comme dans tout l’univers Totalitaire Communiste, la Novlangue Orwelienne est de mise (pages 219 et 220 ) :
« Les communistes sont d’un cynisme surprenant dans leurs manipulations du vocabulaire. C’est ainsi que l’un des camps de concentration où les prisonniers politiques sont maintenus au secret, battus et torturés quotidiennement, porte le nom d’ « Amérique libre ». Un autre, réservé aux femmes et qui existe encore aujourd’hui, est pour ces prisonnières une nuit ténébreuse, éternelle, ce qui ne l’empêche pas d’avoir pour nom « Nouvelle Aurore ». Et dans la région de Santiago de las Vegas, il existe même un camp pour enfants, « L’Arc-en-Ciel » tout simplement ! ».
Armando Valladares nous décrit concrètement en quoi consista le délire Collectiviste du Communisme appliqué à Cuba, engendrant la faillite économique du pays (page 255) :
« Nous avons dépassé l’aéroport. A droite, j’ai aperçu des kilomètres et des kilomètres de plantations de manguiers, une idée de Castro lui-même : on avait gaspillé des millions de pesos à la réalisation de ce projet dont le résultat fut désastreux. Le terrain ne se prêtait pas à ce genre de culture, mais aucun ingénieur agronome n’avait osé contredire le dictateur, et il n’y eut qu’un tout petit nombre de manguiers qui donnèrent des fruits.
Il en fut de même avec une autre campagne démentielle : celle de planter dans les villes une sorte de caféier dit caturra. Il devait y avoir des caféiers partout, sur les places, sur les terrains en friche et à bâtir, dans les jardins et sur les balcons, et Castro de proclamer que nous allions avoir du café en abondance. Un jour, alors que Castro, en pleine effervescence et possédé par sa nouvelle idée de génie, l’exposait dans le lieu dit Cordon de la Habana, devant un groupe de diplomates, un fonctionnaire anglais de l’Organisation mondiale pour l’alimentation et l’agriculture (F.A.O.) lui déclara carrément qu’ils ne récolterait jamais un grain de café avec ce type de caféiers. C’était l’opinion d’un spécialiste.
Castro, indigné, s’emporta, et la discussion devint si vive que les autres diplomates durent intervenir pour mettre fin à l’incident.
Le spécialiste de la F.A.O. avait raison. Jamais ce type de caféiers ne produisit un seul grain de café. Et l’on enterra l’affaire, considérée dès lors comme taboue. Mais chaque fois que l’Anglais rencontrait à Londres des délégations cubaines, il se faisait un malin plaisir de demander ironiquement des nouvelles des caféiers caturra, la grande idée de Castro. »
Puis, Armando Valladares connu l’horreur du camp de concentration et des travaux forcés dans les plantations, puis dans les carrières de roches (page 264) :
« Notre gigantesque camp de concentration comptait alors plus de six mille prisonniers. »
Ici, encore, comme dès les premiers temps de l’ère Bolchevico-Soviétique, l’esclavagisme subit par ces prisonniers était si terrible et éreintant, qu’ils se demandaient réciproquement de se mutiler, afin d’être exempt de travail (pages 290 et 292) :
« – … Donne-moi un coup de pic dans le pied. Ils seront bien obligés de m’envoyer à l’infirmerie, et je serai exempté de camp de travail pendant quelques semaines.
Je me suis rendu compte qu’il était dans un état effroyable de dépression. J’ai essayé de le calmer. Nombre de nos compagnons demandaient aux autres de les blesser pour pouvoir se reposer quelques jours ou quelques semaines, selon la gravité du cas.
(…) Sous les coups, sous la terreur, les vieux traumatismes mentaux de certains se réveillaient, et ils devenaient vraiment fous d’angoisse et d’horreur ! Être voué au camp de travail, c’était en effet risquer non seulement les coups, mais une infirmité à vie et même la mort. Pour s’y soustraire, beaucoup de malheureux se sont mutilés en se disant aussi que c’était une solution pour demeurer en vie. En dehors des fractures, on pouvait, avec une seringue, s’extraire la synovie du genou, s’injecter du pétrole, se frotter le corps et le visage avec des plantes urticantes qui provoquaient une enflure monstrueuse, ou encore se faire piquer les joues et même le membre par des abeilles ! Certains se grattaient la peau avec une petite bourse de toile remplie de sel humide : il en résultait des plaies horribles que ces désespérés approfondissaient encore pour les empêcher de se cicatriser. »
Durant des décennies, le Monde a nié, voire même parfois soutenu les persécutions du régime Totalitaire Communiste Castriste. Armando Valladares témoigne de cet affligeant constat (pages 306 et 307) :
« En vain avions-nous fait l’impossible pour que la Commission des droits de l’homme de l’O.N.U. acceptât d’étudier nos plaintes. Nous avons réussi à faire parvenir à cet organisme des informations précises, détaillées, sur les tortures, les assassinats des communistes, leur projet de nous faire sauter avec les explosifs entassés dans les caves des circulaires. Cette commission prestigieuse devient aveugle et sourde dès qu’il s’agit des crimes commis par les communistes, par exemple dans les prisons cubaines.
Et il en était de même alors avec la Croix-Rouge internationale. Toute plainte concernant une violation des droits de l’homme à Cuba est longtemps restée sans réponse : pour la Croix-Rouge internationale, les prisonniers politiques cubains n’existaient pas. Il n’y en avait pas. Elle ne pouvait donc pas s’occuper d’eux !
Finalement, après bien des années, la Croix-Rouge nous a découverts ! Ce n’est pas encore le cas des membres de l’O.N.U.. Pourtant, ils savent tout : chacun d’eux, individuellement, est au courant des horreurs des prisons cubaines, mais dans leurs assemblées annuelles, ils n’osent pas condamner le régime de Castro. Pourquoi ? »
Pour humilier les prisonniers et les déshumaniser toujours davantage, le Pouvoir Castriste les obligeait à rester nus (page 331) :
« Plus l’hiver avançait, plus il était rigoureux. On enregistre à Cuba des températures de 1 à 2 degrés au-dessus de zéro. Ce froid, qui nous empêchait de dormir, n’a pas suffi pour briser notre résistance.
Les autorités du pénitencier ont dû imaginer d’autres méthodes. Elles sont nées dans la prison dite « du 5/2 », à Pinar del Rio, domaine du féroce « El Nato ».
Les prisonniers étaient complètement nus. Quand on les faisait sortir pour nettoyer les couloirs, certains, par pudeur, s’étaient confectionné avec du papier et un bout de fil une sorte de pagne. Mais tous les quatre ou cinq jours, même ces pagnes disparaissaient au cours d’une fouille. »
Non seulement, Armando Valladares dut traverser d’innombrables douloureuses épreuves personnelles de tortures physiques et psychologiques, mais de surcroît, il se souciait également des persécutions du régime Castriste à l’encontre de l’ensemble de sa famille (page 353) :
« Cette nouvelle m’a énormément préoccupé : c’était une souffrance supplémentaire qui s’ajoutait aux difficultés de mon existence. Cela signifiait surtout que ma famille allait sans doute connaître la misère et les persécutions. Ma mère et ma sœur restaient seules, sans défense, encore plus suspectes puisque mon père, en plus de moi, était désormais en prison pour crime politique. »
La page 355 du témoignage de l’auteur est consacrée au comportement totalement hallucinant, détestable, affligeant et dramatique du Président de l’association de défense des Droits de l’Homme, Amnesty International, dans les années 1960 : Sean McBride, grand adepte du Soviétisme ! La voici donc dans son intégralité :
« Tous les gouvernements et tous les organismes internationaux ont alors connu l’existence à Cuba de prisonniers réduits à une stricte nudité, mais ils ne se sont pas donné la peine de répondre à nos dénonciations. Amnesty International a gardé à ce sujet un silence significatif : elle avait alors pour président Sean McBride, titulaire du prix Lénine de la Paix. Comme tout le monde le sait, cette distinction est attribuée par le Soviet suprême de l’U.R.S.S. à ceux qui défendent les intérêts de l’Union soviétique, sa politique étrangère et ses conceptions idéologiques. C’est ce même McBride qui, dix ans plus tard, présidait en juillet 1978 une conférence sur les Droits de l’Homme, organisée au Venezuela pour dénoncer les violations dont ces droits faisaient l’objet en Amérique latine. D’une façon correcte et extrêmement courtoise, il a salué ma femme qui participait à la conférence. Il est vrai qu’il ignorait alors qui elle était. Mais quand Martha a commencé son discours et que McBride l’a entendue affirmer que ces mêmes droits étaient violés à Cuba, il a perdu d’un coup son vernis d’homme bien élevé pour se mettre à hurler dans une véritable attaque d’hystérie et interdire à ma femme de continuer à parler.
Comme elle essayait malgré tout de le faire, on l’a vu frapper violemment son pupitre de la main, à la Khrouchtchev, pour empêcher qu’on l’entende, tandis qu’il criait dans le micro aux interprètes chargés des traductions simultanées qu’il leur interdisait de traduire les paroles de Martha ! Devant une assistance consternée, il est parvenu à réduire Martha au silence. Le lendemain, le quotidien vénézuélien Ultimas Noticias titrait sur toute la largeur de la première page :
VIOLATION DES DROITS DE L’HOMME
A LA CONFÉRENCE DES DROITS DE L’HOMME
et le reste de la presse écrite a commenté et critiqué durement cet incident.
M. McBride avait refusé d’entendre dire que l’on torturait et tuait des êtres humains, hommes et femmes, à Cuba. Qu’eût pensé le Soviet suprême de l’U.R.S.S. si le docile McBride, dans un sursaut d’indépendance, avait laissé parler un témoin oculaire de ces crimes, comme l’a été ma femme ? Peut-être lui aurait-on retiré sa médaille du prix Lénine de la Paix et supprimé ses collaborations à radio Moscou ? »
Après avoir passé, à nouveau, quelques temps dans la prison de la Cabana, Armando Valladares a été déporté, le 11 février 1970, dans de terribles conditions, dans le plus impitoyable camp de concentration de Cuba : le pénitencier de Boniato (pages 377 et 378) :
« Cette date, c’est celle où nous avons commencé à subir un plan d’extermination et d’expérimentation biologique et psychologique qui est le plus brutal, le plus impitoyable et le plus inhumain de tous ceux qu’a connus le monde occidental depuis les crimes des nazis. Un système totalitaire de cruauté mentale, d’acharnement et de tortures.
Boniato et ses cellules murées demeureront à jamais un témoignage atroce contre ce régime, la preuve que Fidel Castro a supplicié, condamné à la folie, assassiné ses prisonniers politiques. On pourrait éliminer toutes les autres violations des droits de l’Homme dont il s’est rendu coupable, ce qui s’est passé à Boniato suffirait à faire du régime qu’il a instauré le plus cruel et le plus dégradant de tous ceux qu’a connus le continent américain. »
Dans le camp de Boniato, les séances de tabassages et de tortures se succédaient sans cesse (pages 380 et 381) :
« Quand les gardiens se lançaient à l’assaut pour nous battre, il [le sergent Buena Gente] ne s’arrêtait pas d’acclamer le communisme. « Vive le communisme » était chez lui une sorte de cri de guerre. Il demandait aux autres de lui laisser les blessés pour qu’il puisse les frapper sur leurs bandages : comme ça, expliquait-il, « ils ne peuvent pas prouver qu’on les a frappés deux fois ».
(…) Les blessés les plus graves n’avaient droit à aucun médicament, même pas à un cachet d’aspirine. Notre section était un vase clos d’où aucun prisonnier ne sortait jamais à moins d’être en danger de mort. Ils n’avaient nullement l’intention de nous tuer rapidement, c’eût été trop de générosité de la part de nos bourreaux.
Ils avaient toujours le même objectif : nous torturer et nous inspirer une telle terreur que nous accepterions leur plan de réhabilitation politique. Pour atteindre leur but, ils avaient envisagé froidement une lente et inexorable désintégration : nous amener au seuil même de la mort et nous y maintenir sans que nous puissions ni le franchir ni reculer. Tout était préparé avec un sadisme méticuleux, à tel point qu’avant notre départ de La Havane, on nous avait vaccinés contre le tétanos. Ils pouvaient désormais nous blesser à coups de baïonnette ou de machette, nous faire éclater le cuir chevelu avec leurs chaînes, nous étions incapables de contracter cette maladie. »
Le camp de Boniato représentait l’enfer sur Terre. On se demande comment des êtres humains ont réussi à survivre à ces traitements permanents si barbares (page 385) :
« Ces « tombes » ont été construites spécialement pour nous, les prisonniers politiques cubains. Après leurs échecs antérieurs, c’est en elles que les autorités ont mis leur confiance pour parvenir à leurs fins. Dans l’esprit de leurs inventeurs, ces cellules murées devaient réussir là où les travaux forcés de l’île des Pins, avec leurs marécages, leurs carrières, leurs semailles, avec leurs tortures, leurs mutilations et leurs assassinats, n’avaient pas réussi.
Aujourd’hui, en écrivant ces Mémoires, comment ne penserais-je pas aux centaines d’hommes qui furent mes compagnons et qui se trouvent toujours dans cet enfer, dans des conditions pires encore ? Il y a deux ans, pour les isoler encore plus, l’administration pénitentiaire a eu l’idée d’élever de chaque côté de ce bâtiment un grand mur, puis de réunir ces deux murs par un treillis de fils de fer qui passe au-dessus du toit, si bien que toute la construction se trouve en cage. Les couloirs sont surveillés par des circuits clos de télévision.
Les dirigeants des prisons cubaines pouvaient être satisfaits. Tous les directeurs des camps de concentration de la province et des pénitenciers étaient venus nous voir inaugurer ce chef-d’œuvre. Contents d’eux-mêmes, ils riaient avec la fierté de philanthropes qui se félicitent de l’hôpital ou de l’école qu’ils ont créés. Il y avait de l’ironie et du persiflage dans le ton des voix qui nous parvenaient, comme s’ils savouraient d’avance leur triomphe sur nous. Enfin, les « emmurages », comme ils disaient, étaient devenus réalité ! Pour en arriver là, les constructeurs avaient utilisé toute l’expérience accumulée par les Soviétiques, les Tchèques, les Hongrois et les communistes allemands en matière de tortures et d’anéantissement de la personne humaine. Tout ce qu’il y avait de mieux dans les appareils répressifs de l’Europe de l’Est était réuni dans cette grande œuvre. Les médecins et les psychologues des pays communistes, y compris ceux de Cuba, avaient apporté leur concours scientifique à l’élaboration des régimes alimentaires, au calcul des calories, à la création de situations déstabilisantes, à la manière de susciter les maladies de carence les plus pénibles, etc..
Certains officiers ne nous ont pas caché que les plus « durs » des prisonniers de droit commun n’avaient pu résister à la réclusion dans ces tombes, et qu’avant six mois nous implorerions notre pardon à genoux… Puis ils nous ont poussés à l’intérieur des cellules. Le bruit des cadenas et des verrous a été étouffé par le fracas assourdissant des lourdes portes de fer qui se sont refermées derrière nous, pour combien de temps, hélas… Plusieurs d’entre nous n’allaient jamais sortir vivants de ce sombre lieu. »
Certains bourreaux « médecins » avaient comme mission, de la part des autorités Castristes, de procéder à des expérimentations « médicales » sur les prisonniers, ainsi transformés en cobayes vivants, comme sur des rats de laboratoire (pages 395, 396, 397, 399 et 400) :
« Les « médecins » se souciaient uniquement des œdèmes qui montaient plus haut que la ceinture, vers le visage. Ils savaient que si l’œdème attaque les poumons, le cerveau et les viscères, les complications sont alors mortelles. Dans les cas graves, le malade partait pour le petit hôpital, local spécial lui aussi aveuglé de plaques de fer avec mise au secret. Plusieurs médecins et psychologues l’accueillaient, le pesaient, et exerçaient sur lui, dès son arrivée, une surveillance rigoureuse. Les interrogatoires commençaient aussitôt : ils portaient plus sur la détérioration mentale que sur nos maux physiques. Cette détérioration faisait l’objet d’une étude approfondie : quand avait-elle commencé ? Et comment ? A combien la chiffrions-nous ?
Ils multipliaient les analyses de tout genre, mesuraient et pesaient nos aliments, nos excréments, notre urine, prenaient notre température et notre tension artérielle environ toutes les quatre heures. Ces investigations s’étendaient sur quatre ou cinq jours au bout desquels ils administraient au malade des doses massives de diurétiques telles que le patient, obligé de se lever constamment pour uriner, n’arrivait plus à dormir. On nous gonflait et dégonflait à volonté, comme des ballons.
(…) Chez moi, l’œdème a commencé par les chevilles. De là, il a gagné les cuisses et les parties génitales. Il me suffisait d’appuyer doucement le doigt sur ma jambe pendant vingt ou trente secondes pour y produire un creux, comme si mes muscles s’étaient transformés en pâte à modeler. Puis, lentement, le liquide chassé reprenait sa place et le creux disparaissait. En maintenant plus longtemps la pression du doigt le creux pouvait atteindre jusqu’à un pouce (deux centimètres et demi) de profondeur.
(…) Et les semaines passent, et chaque jour apporte sa charge de nouvelles rigueurs à notre réclusion. J’ai de plus en plus fréquemment des nausées, des diarrhées. Nos cheveux tombent par plaques. Ma bouche s’est couverte de plaies brûlantes comme des braises. Mes lèvres desséchées ne sont plus qu’une suite de crevasses.
(…) Parmi nous, certains sont devenus complètement fous. Ils gémissent et appellent leurs parents, ceux qu’ils aiment, ou ils se laissent aller à des crises de pleurs et de rires. D’autres crient comme si les communistes approchaient pour nous rouer de coups, mais ce n’est qu’une illusion de leur pauvre esprit perturbé. Nous le savons, mais chaque fois nous nous réveillons en sursaut, nous demandant dans notre angoisse : « Et si c’était vrai ? ».
(…) Le capitaine de la Police politique qui nous avait annoncé qu’on ferait de chacun de nous une « guenille » ne nous avait pas menti. L’administration pénitentiaire poursuivait méticuleusement son dessein. Nous ressemblions à des spectres. Nous étions squelettiques, comme ces survivants, sauvés à temps des camps de concentration nazis, qui avaient perdu quinze, vingt, et jusqu’à trente kilos de leurs poids normal. Certains d’entre nous enflaient monstrueusement, au contraire ; d’autres n’arrivaient plus à se lever. »
C’est alors que Martha (son épouse) et sa famille réussirent à fuir Cuba. Elle allait devenir la personne essentielle pour la future libération d’Armando, mais pas sans de grandes difficultés, comme nous l’avons vu plus haut avec l’exemple d’Amnesty International… (page 401) :
« Enfin, Martha parvint à sortir de Cuba, accompagnée de ses parents. Elle allait faire connaître à l’étranger ma situation et celle des autres prisonniers politiques. Peut-être réussirions-nous, grâce à elle, à sensibiliser l’opinion publique mondiale en lui révélant, sans contredit possible, les horreurs de l’univers carcéral castriste.
Tout comme l’a fait Staline en Union Soviétique, Castro a toujours nié qu’il y ait à Cuba des camps de concentration, des prisonniers politiques. Les prisons cubaines, d’après lui, ne connaissaient ni la torture ni le crime organisé.
Martha avait toutes les qualités nécessaires pour nous aider à rétablir la vérité, et elle allait le faire. »
Pendant ce temps, l’état physique d’Armando Valladares, et de ses compagnons, avait atteint un stade plus que critique (pages 402 et 403) :
« Certains étaient si émaciés, si cadavériques, qu’avec la blancheur typique de leur peau, on aurait pu croire qu’ils étaient morts si leurs pupilles n’avaient eu un éclat aussi lumineux. Leurs yeux vivaient encore au fond de leurs orbites creuses, leurs pommettes saillaient, ils avaient la peau collée aux os. J’ai remarqué que les dents de Roberto Alonso s’étaient déplacées et qu’Arroyo en avait perdu quelques-unes. Il m’arrivait d’avoir les yeux remplis de larmes en regardant ces pauvres gens, et puis je me suis aperçu que ceux qui venaient à moi pour me saluer me dévisageaient eux aussi avec pitié. Je n’avais pas compris jusqu’à lors que je devais avoir le même aspect qu’eux… »
Et l’auteur fut encore transféré à la Cabana…
En exil, Martha se sentait impuissante face à l’importante propagande déployée par l’État Totalitaire Communiste Castriste, et face à l’indifférence du Monde Libre (pages 415 et 416) :
« La propagande de Castro et de ses porte-parole étouffe dans le monde entier les cris de nos martyrs, les clameurs des victimes.
A l’extérieur du pays, la majorité des gens voit en Cuba une sorte de paradis terrestre créé de toutes pièces par la révolution !
La grande presse, à force de déformer la réalité cubaine, cautionne le tyran, et les gouvernements des pays capitalistes d’Europe lui prodiguent un soutien diplomatique, commercial, une aide financière généreuse, gratuite même comme dans le cas de celle de la Suède.
L’Internationale Socialiste elle aussi apporte sa caution aux crimes du despote, et vingt-cinq ans plus tard, elle continuera à le faire sans même rougir de honte.
Toutes les accusations portées devant les organisations internationales et particulièrement devant la Commission des droits de l’homme des Nations Unies sont boycottées et refoulées par les pays communistes et les partisans de Castro, et les centaines de documents et toutes les informations qui établissent de manière irréfutable les tortures, les crimes et les violations des Droits de l’Homme commis chaque jour, à chaque instant, par le régime communiste de Castro, aboutissent simplement dans les corbeilles à papier de ces grandes administrations.
Silence, partout règne un silence complice. La botte qui écrase notre nuque est communiste, mais le pied qui la chausse et la guide est celui du monde capitaliste.
Quelle tristesse, quel désespoir que de constater cette indifférence de la part de ceux qui devraient se sentir solidaires de notre sacrifice ! Comment ne pas s’indigner devant cette chape de silence douloureux, déprimant, qui dissimule sciemment la barbarie et les atrocités des prisons cubaines, et que maintiennent hermétiquement sur nous les mains qui auraient dû se lever pour condamner les criminels.
Je ne me résigne pas, mais j’ai compris que nous ne pouvons rien attendre du monde libre, qu’il n’est disposé à entendre des voix indignées et accusatrices que lorsqu’elles condamnent les dictatures de droite. Je sais désormais toute la difficulté qu’il y aura à créer un mouvement d’opinion suffisamment puissant pour que l’on fasse quelque chose en faveur de notre liberté, de la Liberté. »
En prison, Armando Valladares rencontra Pierre Golendorf, un Français, membre du Parti Communiste Français (P.C.F.), venu à Cuba pour travailler avec le gouvernement Castriste. Il devait regretter amèrement ce double engagement : pour le Communisme et pour le Castrisme. En effet, se rendant compte de l’infâme réalité du Castrisme, il dénonça cet état de fait à Castro, qui le fit, bien évidemment, promptement enfermer dans ses ignobles geôles (page 419) :
« « – Et le plus dramatique dans cette tromperie, mon pauvre Pierre, c’est qu’elle nous interdit, à nous autres Cubains, de faire connaître au monde la vérité sur nos prisons, sur nos camps de concentration, sur ces tortures et sur ces crimes…
– Je ne le sais que trop, Valladares… La majorité de la gauche européenne est pleine de bienveillance à l’égard de Castro, et elle est prête à accepter de sa part des faits répréhensibles en les qualifiant d’actes de légitime défense de la révolution !
– Il n’existe pas de « bonne » dictature. Pour terribles et injustifiables que soient celles de droite, les régimes totalitaires de gauche ont versé beaucoup plus de sang. Disons que les premières coupent un bras, mais que les autres vous amputent des quatre membres, et de plus vous triturent le cerveau en faisant de vous un imbécile. Staline et Mao, à eux seuls, ont tué plus de cent vingt millions d’êtres humains. Et leurs disciples, comme Castro, continueront à le faire parce que c’est pour eux la seule façon de se maintenir au pouvoir. »
C’est ainsi que nous sommes devenus de grands amis, Pierre Golendorf et moi. Et quand nous ne pouvions nous rejoindre dans la cour, nous nous écrivions. »
Durant donc des années, voire des décennies, les organisations internationales de défense des Droits de l’Homme, comme Amnesty International, ne se préoccupèrent pas du sort de la malheureuse population Cubaine et de manière générale, de toutes les victimes des régimes Totalitaires Communistes dans le monde ; comme c’est d’ailleurs encore le cas, aujourd’hui, en Corée du Nord.
Même l’O.N.U., pendant de longues années, ne bougea pas le petit doigt pour leurs venir en aide (page 428) :
« Pendant ce temps-là, Castro continuait à fusiller ceux qui s’opposaient à lui ; dans toutes les prisons, les tortures d’hommes et de femmes suivaient leur cours habituel ; et mieux encore, la Cuba marxiste de Fidel Castro posait officiellement sa candidature pour occuper un secrétariat à l’O.N.U., celui, justement, de la Commission des Droits de l’Homme ! Le siècle qui vient se demandera si tout cela a été possible ! »
Et ce fut, à nouveau, pour Armando Valladares, le retour dans l’enfer de la prison de Boniato. Malgré tout, l’auteur réussit à transmettre à Martha l’effroyable récit d’un massacre qui venait de se commettre dans la prison (page 441) :
« J’ai réussi à faire passer à Martha une lettre dénonçant ce qui venait d’avoir lieu à Boniato. Le Dr Medrano et un groupe d’exilés l’ont fait parvenir à l’O.N.U.. Mais les responsables de cette institution sont de ces aveugles et de ces sourds d’autant plus aveugles et sourds qu’ils le sont volontairement, car ils se refusent à voir et à entendre dès qu’il s’agit de crimes commis par la dictature castriste contre ses prisonniers politiques. Ils n’ont même pas accusé réception de la lettre. »
Pour la énième fois, retour à la case départ (prison), pour l’auteur : la Cabana.
Enfin, ayant réussi à faire publier ses écrits (lettres et poèmes) à l’étranger, le dossier d’Armando Valladares fut pris en charge par Amnesty International. A partir de ce moment-là, son cas fut internationalement connu… (page 445) :
« Je peux affirmer que cette clameur muette, venue de l’étranger, a contribué grandement à faire reculer les autorités communistes tentées de m’éliminer physiquement, de façon violente, comme tant d’autres détenus.
L’adoption par Amnesty International constitue dans un tel cas une sorte de protection. Les complices de Fidel Castro savaient désormais que, dans le monde entier, il y avait des gens au courant de ma situation.
Le groupe 110, de Suède, a accompli un travail extraordinaire, et c’est à ces Suédois que je dois en grande partie d’avoir été remis en liberté.
Jour après jour, Martha progressait : mon cas et celui de mes compagnons était de plus en plus connu et, dans la presse mondiale, un nombre croissant d’articles évoquait notre cas. »
Le 15 janvier 1977, Armando Valladares eut tragiquement l’insigne « privilège » d’inaugurer, avec d’autres prisonniers, la nouvelle prison du « Combinat de l’Est », pouvant contenir jusqu’à 13 500 prisonniers. L’Archipel concentrationnaire ne cessait de s’agrandir…
Les camps de travaux forcés dans l’univers Castriste s’appelaient les : Unités militaires d’aide à la production (U.M.A.P.).
Le régime Communiste Castriste persécutait les minorités et tous ceux qui s’opposaient au Communisme : Témoins de Jéhovah, prêtres catholiques, homosexuels, dissidents politiques, etc., qu’il envoyait se faire rééduquer par les travaux forcés (esclavagisme) dans ces U.M.A.P..
Finalement, après moult autres tragédies et au bout de 22 années d’enfermement, vint enfin le temps de sa libération. Sous la pression des organismes internationaux de défense des Droits de l’Homme, et de certains intellectuels Français, François Mitterrand en fit la demande directement auprès de Fidel Castro.
Mais lorsque monsieur Charasse, l’ambassadeur intérimaire de France, vint le chercher en personne, malgré ses 22 années d’enfermement, l’auteur refusa de quitter l’île sans le reste de sa famille. Jusqu’au bout, Armando Valladares privilégia la droiture de sa conscience, plutôt que ses intérêts personnels légitimes, que représentent : son intégrité physique et psychologique et…, sa Liberté.
Après discussions, mais pas réellement rassuré par le fait que, finalement, les négociations incluaient, à terme, la libération de sa famille, Armando Valladares finit par accepter de quitter, seul, Cuba et son régime infernal, pour enfin retrouver son épouse Martha, à Paris !
Durant son voyage qui le conduisait à l’aéroport, Armando Valladares se remémorait ses 22 années de calvaire et celui de ses compagnons… (pages 521 et 522) :
« Les voitures roulent rapidement, et un mélange de mélancolie et de joie me replonge dans vingt-deux ans de souvenirs. Je me rappelle les sergents Porfirio et Matangas enfonçant leurs baïonnettes dans le corps d’Ernesto Diaz Madruga ; Roberto Lopez Chavez agonisant dans une cellule, réclamant un peu d’eau à ses gardiens qui urinent alors sur son visage, dans sa bouche ; Boitel à qui, après plus de cinquante jours de grève de la faim, ses bourreaux refusent également de l’eau parce que Castro lui-même a ordonné de l’éliminer ; et sa vieille mère douloureuse, Clara, frappée dans les locaux de la Police politique par le lieutenant Abad uniquement parce qu’elle veut connaître l’endroit où l’on a enterré son fils ; et Carrion, blessé d’une balle à la jambe, demandant au milicien « Jagüey » de ne plus tirer, et tué froidement par celui-ci, dans le dos, d’une rafale de mitraillette.
J’ai alors regardé ces officiers qui m’entouraient, et comment n’aurais-je pas pensé à d’autres officiers, semblables à ceux-ci, qui ont menacé les proches de Carrion de leur ôter son cadavre s’ils continuaient à pleurer ?
Et Estebita, Pire, morts un matin dans leurs cellules murées, victimes d’expériences biologiques. Et Diosdado Anuit, et Tan, et Eddy Molina et tant d’autres assassinés dans les camps de travaux forcés.
Une légion de spectres nus, estropiés, défile dans mon esprit, avec les images de ces horribles perquisitions qui chaque fois laissaient derrière elles des centaines de blessés ; et les mutilés ; et la menace de la dynamite pour nous faire sauter en cas de débarquement des insurgés ; et les cachots disciplinaires, ce royaume des coups ; et les mains d’Eduardo Capote coupées à la machette ; et les camps de concentration, les tortures ; et les femmes battues en prison ; et le gardien qui m’a jeté au visage mon urine et mes excréments ; et Eloy, et Izaguirre, et Martin Perez blessé aux testicules par les balles de ses bourreaux. Et Robertico, le petit Robert, battu, violé, pleurant et appelant sa mère parce qu’il avait douze ans et avait peur la nuit… ».
Conclusion :
Comme tous les témoignages des prisonniers de régimes et systèmes Totalitaires, ici Communisto-Castriste, le récit d’Armando Valladares est lui aussi stupéfiant d’effroi. 22 années d’enfermement dans de multiples : prisons, camps de concentration et camps de travaux forcés. La Totale !
Des conditions dégradantes et inhumaines. Torturé, frôlant de nombreuses fois la mort : par maladies, par manque total d’hygiène, à cause de la famine, du froid, par ses différentes grèves de la faim, les risques d’exécution, etc. !
Bref, Armando Valladares est un revenant de l’enfer Castriste, un fantôme revenu de l’outre-tombe Marxiste-Léniniste !
L’auteur a subi des souffrances mentales, morales, psychiques et physiques aussi immenses et profondes, qu’indescriptibles.
Il faut donc ajouter ce témoignage exceptionnel, comme pièce à conviction, à l’encontre des régimes Totalitaires, pour notre Mémoire Universelle et l’Histoire de l’Humanité !
Page 522 :
« A notre point de vue, nous autres, nous n’avons aucun problème en ce qui concerne les Droits de l’Homme : ici, il n’y a pas de personnes disparues, pas de personnes torturées, pas de personnes assassinées. En vingt-cinq années de révolution, malgré les difficultés et les dangers que nous avons traversés, il ne s’est jamais commis une torture, jamais commis un crime. »
(Déclaration de Fidel Castro à des journalistes français et américains du Nord dans le palais de la Révolution, à La Havane, le 28 juillet 1983, publiée par le journal Granma, édition du 10 août de la même année).
Et aujourd’hui, en 2016, 31 ans après la publication de cet effroyable témoignage et 57 ans après le coup d’État Castriste, les frères Castro : Fidel et Raul, sont toujours à la tête de cet infâme régime Totalitaire Communiste Castriste… !
Détails sur Mémoires de prison. Un témoignage hallucinant sur les prisons de Castro
Auteur : Armando Valladares
Editeur : Albin Michel
Nombre de pages : 522
Isbn : 978-2226025937