Née en 1880 dans la ville de Thiers dans une famille d’artisans couteliers, Anaïs Mauricia Betant quitte très jeune un environnement un peu triste pour aller s’installer à Nice puis à Paris où elle décide de se lancer comme artiste de music-hall sous le pseudonyme de Mauricia de Thiers. Elle met au point un numéro fort dangereux, « l’autobolide » consistant à faire faire un looping à une petite voiture puis à la lancer dans le vide, roues en l’air, et à la faire retomber sur un toboggan d’arrivée. Avec ce numéro périlleux (puis avec deux autres, un saut périlleux à cheval avec plongeon dans une piscine et « le bilboquet humain » avec arrivée à la pointe d’une grande perche), elle force l’admiration des foules par son courage exceptionnel. Elle sera la vedette du cirque Barnum et devra arrêter sa vie de casse-cou en raison d’un grave accident qui surviendra au Portugal. Quand elle se mariera avec le critique d’art Gustave Coquiot, elle entamera une deuxième vie plus marquée par le monde de la peinture. Elle connaîtra tous les peintres de l’art moderne naissant, de Picasso à Dufy en passant par Modigliani, Utrillo, Chagall et bien d’autres. A la mort de Coquiot, elle abordera sa troisième vie en restant, jusqu’à sa mort en 1964, maire d’Othis, un petit village de Seine et Marne où elle s’était retirée avec sa soeur.
« La femme bilboquet », sous-titrée « Biographie de Mauricia de Thiers » présente un magnifique portrait de femme, un destin hors du commun. Mauricia Coquiot connut gloire et fortune, voyagea dans de nombreux pays, côtoya les plus grands artistes mais resta toujours proche des gens, simple et dévouée aux artistes comme à ses administrés. En plus de nous faire découvrir ce caractère exceptionnel, la lecture de ce livre bien écrit mais reposant sur une documentation assez peu fournie (l’auteur ne l’a pas connue de son vivant et n’a donc pu recueillir que des témoignages de seconde main et des correspondances incomplètes) a également le mérite de proposer une description fort intéressante d’une époque qui fut qualifiée de « belle » alors qu’elle ne le fut que pour une petite minorité de gens oisifs et fortunés. Pour celles et ceux qui s’intéressent à cette période de notre Histoire et à une destinée tout à fait exceptionnelle.
4/5
La femme bilboquet (Alain Woodrow)