Le Califat du sang a violemment surgit dans notre actualité et a choqué les opinions publiques avec une communication de terreur très efficace, mettant en scène la mort d’otages à coup de décapitations. Le monde est tétanisé face à cette nouvelle secte barbare dont la détermination à tuer ou à mourir de ses membres est aussi incontestable qu’effroyable.
« Ces insurgés de l’Apocalypse sont capables du pire et ils commettent le pire. »
p8
Alexandre Adler nous propose un état des lieux et une analyse des raisons historiques, géopolitiques et géostratégiques qui ont prévalues à l’avènement apparemment irrésistible de Daech et qui démontrent, paradoxalement, que la chute de l’État islamique est inévitable.
Le califat est un régime politique, la théocratie héréditaire, qui a connu, au fil du temps, diverses interprétations et mises en pratique dans l’ère de l’Islam ; cela a facilité les schismes, et donc les antagonismes à l’intérieur même de l’Islam. A l’image des Chrétiens, les musulmans ont des divergences théologiques parfois irréconciliables, mais bien souvent ignorées dans nos contrées occidentales.
Le fond théorique du Califat du sang provient d’Abdullah Azzam (1941 – 1989), universitaire saoudien qui a transposé les pratiques et techniques marxistes à l’Islam politique, notamment le principe maoïste des « bases rouges » qui consiste à « libérer » de petits territoires épars dans lesquels la faiblesse de l’état central est marquée et faire ensuite le lien territorial entre ces entités. Cette stratégie a été mise en œuvre à diverses périodes et avec des succès divers et relatifs en Afghanistan, en Tchétchénie, au Soudan, en Ouzbékistan, au Yémen, au Kosovo…
Aujourd’hui, il y a désormais plusieurs territoires, plusieurs fronts ouverts qui prétendent à la restauration du califat, bien que l’État islamique, installé sur les frontières de l’Irak et de la Syrie soit le plus avancé et le plus zélé dans l’application de ce califat du sang.
Alexandre Adler juge cependant que nous vivons aujourd’hui l’apogée de Daech et que les raisons de son échec sont au nombre de quatre :
- Le territoire conquis est semi-désertique, peu peuplé et peu productif en termes économiques pour permettre à celui ci d’être véritablement une « base verte » d’où essaimerait le Califat.
- On a pour habitude de mentionner la manne financière du pétrole de contrebande. Elle existe, mais elle se tarit de plus en plus.
- L’Iran, l’Irak, la Syrie, l’Arabie Saoudite, l’Égypte, évidemment l’ensemble du monde occidental, Russie comprise condamnent ce régime. Le seul réel allié objectif dont dispose Daech dans la région est la Turquie ; alliance peu durable tant les paradoxes sont légions. La Turquie est le pays musulman le plus laïc, le plus proche de la culture européenne, dont le sunnisme tolérant s’accorde si peu avec l’intransigeance de Daech.
- L’État islamique est face à une faiblesse stratégique majeure et ne sait plus comment se développer.
La cruauté de Daech masque les réalités des enjeux géopolitiques et nous empêche de voir que cette stratégie suicidaire n’est qu’un élément transitoire dans la recomposition régionale qui est en cours.
On pourrait ainsi voir le rapprochement historique d’un pôle chiite à dominance iranienne d’un pôle sunnite égyptien qui scellerait le destin de Daech. Par ailleurs et surtout, le « despotisme éclairé militaire » se présente comme une solution viable dans un certain nombre de pays ayant vécu le chaos post-révolutionnaire des Printemps arabes.
On a lu pour vous : « Le Califat du sang » d’Alexandre Adler« L’armée du nécessaire redressement s’est déjà levée. »
p125
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