En lisant le dernier essai de la philosophe Elisabeth BADINTER, et à en croire quelques échos, je devais lire une œuvre préparatoire à une nouvelle révolution féministe.
En réalité j’ai lu l’œuvre d’une des dernières représentantes d’un féminisme, soixante-huitard, archaïque et communautariste.L’auteur, femme de lettres brillante, figure de proue du M.L.F dans les années 70 et philosophe nous propose en réalité une variation sur une thématique maintes fois revisitée, la contradiction et l’affrontement entre état de nature et de culture.
Cet essai de 250 pages est divisé en 3 parties majeures.La première dresse d’abord un état des lieux d’une pseudo- régression de la condition féminine.
La seconde partie, sans doute la plus importante, tend à démontrer que les causes principales de cette régression réside dans le naturalisme prôné par les bobos écolos …ceux-là même qui étaient des compagnons de route du M.L.F autrefois !
Et enfin, un dernier chapitre conclusif sur la diversité des aspirations féminines et le cas atypique des françaises en Europe, né, est c’est sans doute vrai, de la situation des femmes de l’aristocratie et de la bourgeoisie des XVIII è et XIXè siècles.
Sur la forme, je reconnais à Elisabeth BADINTER un essai philosophique de grande qualité, solidement argumenté et extrêmement référencé. Elle est allée chercher dans toutes ces références, les indices souvent épars, d’une prochaine « involution » de la situation des femmes.
Du coup, la démonstration est parfois difficile à suivre. Quelques redondances entre le premier et le troisième chapitre – peut-être pour tenter de mieux convaincre le lecteur – peuvent être reprochés.Pour autant, ma critique sera plus tournée vers le fond de l’argumentation développée par Elisabeth BADINTER.
De l’accumulation des indices émerge un fil conducteur résumé dans cette phrase : « Ce que je dénonce, c’est un discours qui ne tient plus compte de l’ambivalence maternelle. Les femmes n’ont plus la liberté de dire non. Dans les maternités publiques, on culpabilise les femmes avec le lait maternel, le meilleur pour l’enfant… Or toutes les grandes révolutions des mœurs s’opèrent grâce à la culpabilisation« , conclut-elle.
Dès le premier chapitre, elle sonne la charge en victimisant toutes les femmes sans enfants « qui seraient montrées du doigt » et indiquant que l’enfant serait une entrave à la liberté de la femme, où « à la joie » d’enfanter « se superpose l’ennui » et « les sacrifices ».
Elle s’érige en gardien du temple du seul et vrai combat féministe qui vaille : le sien !
Problème, c’est un féminisme orthodoxe, doctrinaire et communautariste qui s’attaque frontalement à l’enfant et à la maternité prenant d’ailleurs d’abord pour cible la notion « d’instinct maternel » qui ne serait en réalité que fadaises issues du mouvement naturaliste.
Là où l’auteur estime que « l’inconscient, l’histoire personnelle de chacune et le modèle social pèsent plus lourd que les hormones », l’anthropologue de l’université de Californie à laquelle elle se réfère dans son livre, Sarah Blaffer Hrdy, démontre que le comportement maternel résulte d’« interactions complexes entre gènes, tissus, glandes, expériences passées et signes de l’environnement… ». Contre le dogme déterministe et biologique bien trop simpliste de Badinter, Sarah Blaffer Hrdy, elle aussi préoccupée par le devenir de la révolution féministe, s’inquiète également que la société perde « l’art d’élever des enfants ».
Dans la seconde partie, elle réserve sa plus grande vindicte à l’encontre de la « Leche League », véritable organe de combat américain pourchassant le lait en poudre, le biberon impie l’immonde tétine et …le mamelon hérétique qui ne cèderai pas à l’impérieux devoir d’un allaitement au sein.
Elle y dénoncera une « sainte alliance des réactionnaires » où elle inclut pêle-mêle les féministes essentialistes, les écologistes et les éthologistes qui s’attaquent à l’industrie, et particulièrement « aux groupes industriels mondiaux ».
C’est là que le débat est intéressant : Mesdames, le dogme féministe prôné par Mme BADINTER, n’a jamais voulu que vous ayez envie, après vos études et vous être investie dans une vie professionnelle, de quitter le marché du travail…vous qui apparaissez (aux yeux des ayatollahs du féminisme) comme les idiotes utiles du capitalisme.
La philosophe, gardien du temple, vous le demande : Retournez au boulot !
Pire que l’homme, le danger totalitaire viendrait de l’enfant dont la femme serait volontairement asservie. Dans le fond, son intégrisme féministe veut faire de la femme un homme comme les autres .
Elle nie, dans une schizophrénie incroyable, l’existence d’un choix équilibré entre vie féminine, professionnelle et vie maternelle.Le fond du problème est qu’à la lutte des classes, elle a substitué un projet politique semblable de lutte des sexes.
Seules les femmes issues de la bourgeoisie et d’un niveau élevé ont parfois pu y trouver leur compte…les autres n’ont plus eu qu’à aller pointer à l’usine en plus du quotidien de la maison.
Croyant libérer la femme par la « nulliparité » et une pseudo égalité professionnelle, les féministes ont en fait livré et enchaîné davantage les femmes des classes populaires à l’influence du patron sans toutefois les libérer de l’influence du mari.Elisabeth BADINTER devrait méditer cette citation de BOSSUET : Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes
Fabrice ROUDERIES
La pensée archaïque d’un « gardien du temple » du dogme féministe.Étiquettes : elisabeth badinter, le conflit la femme la mère, maternité, rouderies