Fondée au début de l’autre siècle par Eugène Schueller, l’Oréal est devenue aujourd’hui la première multinationale de cosmétiques et produits de beauté du monde. Liliane Bettencourt, l’héritière, possède la première fortune de France et l’une des plus importantes du monde. A la mort du patriarche, la présidence du groupe fut confiée à François Dalle qui ne fut pas pour rien dans l’expansion planétaire du groupe. L’époux de Liliane Bettencourt, André n’a jamais exercé de fonction particulière dans la société. Il s’est contenté de diverses fonctions politiques étant maire de son village, député et plusieurs fois ministre sous différents gouvernements. Personnage discret, il fut surtout l’ami de François Mitterrand qu’il connaissait depuis l’époque où il fréquentait le même foyer d’étudiants avec François Dalle comme troisième larron. Tout au long d’un siècle d’histoire, les dirigeants de l’Oréal ont toujours su financer généreusement tous les partis de droite ou de gauche et ceci jusqu’à la mort d’André Bettencourt. Les problèmes commencèrent quand leur fille unique, Françoise Bettencourt-Meyers porta plainte contre François Marie Banier, persuadée que sa mère était victime d’un abus de faiblesse et surtout quand un ancien Président de la République se vit accusé du même délit.
Contrairement à ce que le lecteur pourrait s’attendre, « Les Bettencourt, derniers secrets, » ne se contente nullement d’enquêter sur la partie actuelle de l’affaire (qui n’est semble-t-il que la face émergée de l’iceberg), il pousse l’enquête très loin dans le passé, retraçant l’histoire, on pourrait même dire la Saga de l’Oréal. Et de ces lointains confins ne remontent que de nauséabonds relents. Ainsi apprend-on que le fondateur fut impliqué dans la Cagoule, organisation terroriste d’extrême droite s’il en fut, qu’André Bettencourt, dans l’ombre de Mitterrand et de Dalle, fut un collaborateur du régime de Vichy qui sut le moment voulu se parer des plumes du paon du résistant de la vingt cinquième heure. Il bénéficia, sans doute contre quelques valises de billets judicieusement distribuées, d’appuis et de soutiens qui lui permirent de ne jamais être inquiété tout comme Schueller et Dalle. A la Libération, ni de Gaulle, ni à fortiori l’homme de Jarnac ne voulaient se priver des talents des anciens de Vichy. Jusqu’au jour où le remugle remonta par la grâce de Klarsfeld et Frydman et où la justice s’intéressa aux différents protagonistes… Livre très bien documenté et très intéressant pour qui veut en savoir un peu plus que ce qu’on entend dans nos médias. Du journalisme d’investigation de qualité malheureusement déjà dépassé par l’actualité : Nicolas Sarkozy a obtenu un non-lieu pour cette affaire.
3,5/5
Les Bettencourt, derniers secrets (Ian Hamel)