Il aura fallu attendre 94 longues années avant que ne soit publié un ouvrage à la fois : objectif et très documenté sur Lev Davidovitch Bronstein, plus connu sous le pseudonyme de…, Léon Trotski.
D’ailleurs, cet ouvrage fait partie d’une trilogie de Robert Service (enseignant à l’université d’Oxford) concernant les biographies des trois principaux fondateurs du système Totalitaire Communiste d’U.R.S.S., puis Mondial : celle-ci sur Trotski qui vient d’être éditée en France et à suivre donc, celles de Lénine et de Staline.
Car, curieusement à ce jour, les rares livres concernant Trotski, relèvent pour la plupart, d’hagiographies participant à cultiver le mythe ; et écrites par des écrivains et pseudo-historiens…, Pro-Trotskistes.
Au préalable, voici deux précisions factuelles :
– Les dates exprimées dans ce commentaire sont celles de l’ancien calendrier julien, usité en Russie jusqu’en janvier 1918 et en retard de 13 jours par rapport au calendrier grégorien ;
– Et, le Bolchevisme signifiant majoritaire, était l’intitulé du Communisme avant mars 1918.
Trotski est né le 26 octobre 1879 à Ianovka dans la province de Kherson en Nouvelle-Russie, au sud de l’Ukraine actuelle.
Dès l’adolescence en tant que Marxiste, il était gêné par le bon niveau de vie de sa famille, ce que les Communistes nomment encore aujourd’hui « petit-bourgeois » ou « bourgeois ».
Suite à son agitation Révolutionnaire, il se retrouva pour la première fois en prison en 1898.
Il éprouvait déjà à cette époque, une haine viscérale envers la « bourgeoisie ». D’ailleurs, en exil en France en 1935, il écrira dans un journal, page 71 :
« (…) qu’il n’existait : « aucune créature plus répugnante qu’un petit bourgeois pris d’un besoin primaire d’amasser des biens ». »
Cette description correspondait parfaitement à la condition sociale de ses propres parents. Plus tard (comme nous le verrons), ils devaient eux-mêmes devenir des victimes de la politique de « lutte des classes » par la « dictature du prolétariat » de…, leur propre fils…
Il se maria en 1898 avec Alexandra Sokolovskaïa, une révolutionnaire elle aussi, qu’il rencontra lors de leurs activités militantes. Après avoir été tous les deux emprisonnés, ils furent exilés en Sibérie.
Mais les conditions d’exil sous le régime Tsariste n’étaient en rien comparables avec les premiers camps de concentration et camps de travaux forcés, que Trotski et Lénine allaient mettre en place à partir de 1918, et qui devinrent l’ »Archipel du Goulag » sous Staline, pour reprendre l’intitulé du célèbre ouvrage d’Alexandre Soljénitsyne Oeuvres complètes, tome 4 : l’Archipel du goulag, Tome 1.
Trotski considérait même que le fait de côtoyer des exilés Révolutionnaires : cela ressemblait à une université révolutionnaire libre en pleine Taïga Sibérienne.
Puis, Trotski s’enfuit seul en août 1902 de Sibérie en abandonnant lâchement toute sa famille : son épouse et ses deux bébés. Mais pour Trotski la « cause », à cette époque, passait déjà avant sa propre famille. Les êtres humains les plus proches de lui, passaient au second plan, alors les autres…
Il rencontra pour la première fois en octobre 1902, son futur acolyte co-organisateur du coup d’État d’Octobre 1917 : Vladimir Ilitch Oulianov, plus connu sous le pseudonyme de Lénine. Ce dernier permit à Trotski d’écrire des articles dans son journal l’Iskra (l’Étincelle).
Et cette même année, Lénine publia son livre « Que faire ? », dont l’objectif était de « mettre en place une organisation centralisée de révolutionnaires professionnels ».
En novembre 1902, il rencontra sa seconde femme (mais ils ne se marièrent jamais), Natalia Sedova.
En 1903, Trotski tourna le dos à Lénine, et cette querelle dura jusqu’en juillet 1917.
A l’été 1904, Trotski fit la connaissance à Munich, d’Alexandre Helphand, un Marxiste comme lui, dont le pseudonyme était Parvus. Il devint alors le mentor de Trotski. Tous deux refusèrent d’adhérer aux : Parti Menchevique (signifiant minoritaire) représenté par Martov, et Bolchevique (signifiant majoritaire) représenté par Lénine. Ces deux Partis étaient issus de la scission en 1903, du Parti Ouvrier Social-Démocrate de Russie (P.O.S.D.R.).
Le 9 janvier 1905 se déroula une manifestation pacifique en Russie. Mais celle-ci fut réprimée dans un bain de sang : le « Dimanche Rouge » ; après que le Tsar Nicolas II ait fait tirer sur la foule de manifestants. Cette tragédie déboucha sur une Révolution, qui échoua.
La population traumatisée par cette répression, Nicolas II comprit alors qu’il devenait urgent d’engager de profondes réformes économiques, sociales, de modernisation de la Russie et surtout de Démocratisation.
Quant à Trotski, il jouait déjà pleinement le rôle qu’il s’était attribué, de contestataire invétéré, sectaire et égotiste. Il critiquait TOUT : le Tsarisme, le Capitalisme, les Mencheviques et même…, les Bolcheviques. Bref, l’ »infaillible » Trotski était déjà persuadé de détenir la « Vérité Absolue » en toutes choses.
Pour Trotski, comme lui avait inculqué Parvus, un simple soulèvement était insuffisant, il fallait appliquer ce qui est devenu pour le restant de ses jours, son dogme intangible, à savoir : la « Dictature du prolétariat » dans le cadre d’une « Révolution permanente mondiale ».
Juif d’origine, Trotski se revendiquait d’être : un Marxiste Internationaliste athée.
Le 28 juin 1914, l’Archiduc François-Ferdinand d’Autriche fut assassiné à Sarajevo. Cet évènement fut à l’origine de la Première Guerre Mondiale.
Puis en 1905, Trotski fut à nouveau incarcéré. Il s’évada et s’exila dans différents pays. Il fut expulsé de France en 1916 et se retrouva dans le pays du Grand « Satan » Capitaliste : aux Etats-Unis, en 1917.
Il apprit alors début mars, qu’une Révolution Populaire se déroulait en Russie et que le Tsar Nicolas II avait dû abdiquer.
Aussitôt, il décida de rentrer en Russie et après moult péripéties, il arriva à Petrograd le 4 mai 1917 ; soit un mois après le retour de Lénine, en provenance de Zurich.
Après le renversement de la Monarchie, la nouvelle étape pour les Bolcheviques consistait dans l’élimination du Gouvernement Provisoire de Kerenski, mis en place après l’abdication de Nicolas II.
Trotski voyait dans le Parti de Révolutionnaires Professionnels qu’était le Parti Bolchevique, l’outil lui permettant de pouvoir conduire au Communisme, d’abord en Russie, puis espérait-il, après avoir renversé les classes dirigeantes dans toute l’Europe, de « Communiser » le monde entier !
Courant juin, les Bolcheviques organisèrent de nouvelles manifestations dans le but de relancer une insurrection, au slogan de : « Tout le pouvoir aux soviets », avec l’aide militaire des marins de la base navale de Cronstadt.
En grand adepte de la Révolution Française et tout particulièrement de la
Terreur Jacobine, Trotski se prenant pour un tribun Jacobin, haranguait les marins de Cronstadt tout en démontrant clairement, que son objectif était l’instauration d’un régime dictatorial et violant. Ce qui était excessivement clair dans ses propos, page 200 :
« Des têtes doivent tomber, le sang doit couler… La force de la Révolution française, c’était cette guillotine qui raccourcissait d’une tête les ennemis du peuple. C’est un instrument excellent. Il nous en faut une dans chaque ville. »
Tragiquement pour le Peuple Russe, en 1917, Trotski disposait de moyens techniques d’extermination beaucoup plus conséquents, que dans la France du 18ème siècle, et dont il n’hésita pas un instant à se servir, constamment et massivement.
Le 3 juillet, les marins de Cronstadt ainsi que le 1er régiment de mitrailleurs se présentèrent au siège du Parti Bolchevique, à l’institut Smolny. Mais Trotski, Lounatcharski et Grigori Zinoviev étant conscients que le Gouvernement Provisoire disposait encore de trop nombreux régiments militaires, firent disperser la foule. Ce n’était que partie remise… D’ailleurs, Trotski en 1920, confia lors d’une réunion du Parti : qu’il se servit de ces « évènements » pour « tester » la possibilité d’un coup d’État.
Le 6 juillet, un mandat d’arrêt fut délivré contre Lénine qui s’enfuit alors en Finlande, et Trotski, Kamenev et d’autres Bolcheviques furent emprisonnés.
En Août, survint le conflit ouvert entre Kerenski et le Général Kornilov : Kerenski craignait un coup d’État de Kornilov contre le Gouvernement Provisoire. Pour contrer Kornilov, il libéra les Bolcheviques ; et le 2 septembre, Trotski et Kamenev furent également libérés, en espérant qu’ils compromettent la tentative de putsch de Kornilov. Cette stratégie réussit parfaitement, mais suite à ces libérations, un danger beaucoup plus grand menaçait le Gouvernement Provisoire…
A partir de cette date, ce fut Trotski principalement qui, en l’absence de Lénine exilé en Finlande, tenait les rênes du Parti Bolchevique.
Contrairement à ce que voudrait nous faire croire la propagande Communiste depuis 1917, la « Révolution d’Octobre » fut bel et bien un coup d’État. Et il arrivait à Trotski lui-même, d’appeler un chat…, un chat, et ici, en ce qui nous concerne d’appeler : un coup d’État…, un coup d’État, page 207 :
« Quand je fus libéré de la prison de la démocratie révolutionnaire, nous nous installâmes dans un petit appartement loué à la veuve d’un journaliste libéral, dans une grande maison bourgeoise. Les préparatifs du coup d’État d’octobre allaient bon train. Je devins président du soviet de Petrograd (…). »
Le Comité Central se réunit le 10 octobre, au n°32 rue Karpovka chez Soukhanov, Menchevique de gauche qui était absent, mais en présence de sa femme Galina Flaxerman, Bolchevique, elle, et qui avait tout organisé.
Lénine était rentré clandestinement peu de temps avant à Petrograd, muni d’une perruque.
L’ordre du jour était essentiel, puisqu’il s’agissait de voter Pour ou Contre, le coup d’État : 10 votèrent, Pour, et 2 (Zinoviev et Kamenev), Contre.
La décision ultime était donc prise et elle contribua à bouleverser TOUT le 20ème siècle, dans le monde entier…
Le 16 octobre, fut créé le Comité Militaire Révolutionnaire (C.M.R.), l’organe militaire indispensable devant servir à coordonner et organiser le coup d’État militaire Bolchevique.
Le 24 octobre, dans le cadre du C.M.R., Trotski déclencha les opérations et envoya les soldats prendre le contrôle des points névralgiques de Petrograd, comme : les bureaux de poste et de télégraphe, les banques, les centraux téléphoniques et les gares. Le coup d’État était lancé. Le 25 octobre, ce fut l’assaut du Palais d’Hiver afin de renverser le Gouvernement Provisoire. Kerenski, lui, réussit à s’enfuir quelques heures auparavant.
Un nouveau Gouvernement appelé par Trotski « soviet des commissaires du peuple » ou Sovnarkom fut donc constitué, avec Lénine comme Président et Trotski en tant que Commissaire du Peuple (ministre) aux Affaires Étrangères.
Lénine et Trotski représentaient les deux principaux fondateurs, désormais inséparables, du régime Bolchevique. Et dès le 1er novembre, lors du Comité de Petrograd, Trotski défendit Lénine contre les attaques de Lounatcharski : ce dernier traitant Lénine de dictateur. Maintenant que les Bolcheviques détenaient le Pouvoir, Trotski pouvait à présent, définitivement « tomber les masques » et affirmer clairement ses intentions Dictatoriales, Terroristes et finalement…, Totalitaires, du régime que les Bolcheviques commençaient à mettre en place, page 218 :
« Il n’y a pas de politique intermédiaire. Pas de retour en arrière. Nous sommes en train de mettre en place la dictature du prolétariat. Nous forcerons les gens à travailler. Pourquoi autrefois, sous la terreur, le sabotage existait-il ? Nous, nous n’avons pas simplement la terreur, mais la violence organisée des ouvriers appliquée à la bourgeoisie (…) Il faut dire clairement et sincèrement aux ouvriers que nous ne sommes pas favorables à une coalition avec les mencheviks et les autres ; ce n’est pas là l’essentiel. Ce qui compte, c’est le programme. Nous nous sommes alliés aux paysans, aux ouvriers et aux soldats qui se battent aujourd’hui (…) (Nous n’irons) nulle part si nous ne gardons que quelques bolcheviks (au sein du gouvernement). Nous avons pris le pouvoir et maintenant nous en portons la responsabilité. »
Malgré tout, dans cette déclaration, Trotski, même s’il était un peu plus clair sur ses objectifs à caractères Totalitaires, mentait toujours… Puisque entre mars et octobre 1917, les Bolcheviques avaient promis aux ouvriers, aux soldats et aux paysans, un programme politique résumé en un slogan : « Le pain, la paix, la terre ». Or dramatiquement, ils eurent réellement l’inverse : la Terreur Rouge Bolchevique, la Guerre Civile, le Communisme de Guerre conduisant à la gigantesque Famine de 1920 – 1921 faisant 5 000 000 de morts ; et selon l’expression de Lénine, lui-même : la « guerre à mort aux Koulaks (petits propriétaires terriens) » !
Entre le mois de décembre 1917 et mars 1918, Trotski fut mandaté par Lénine pour négocier la paix avec les Allemands, afin de sortir de la 1ère Guerre Mondiale pour pouvoir se consacrer pleinement, à la mise en place du régime Totalitaire Communiste en Russie, par la « Dictature du prolétariat ».
En novembre 1917, les Bolcheviques se virent dans l’obligation d’organiser des élections, en vue de la convocation de l’Assemblée Constituante. Mais ils perdirent ces élections.
Malgré moult tentatives d’escroqueries, de manipulations et d’intimidations de la part de Lénine, ils furent contraints de convoquer l’Assemblée Constituante, le 5 janvier 1918. Mais celle-ci fut dissoute par la force dès le lendemain.
Au début de l’année 1918, le bureau politique du Comité Central du Parti Bolchevique était composé de : Lénine, Staline, Sverdlov, Sokolnikov et…, Trotski.
La direction du Comité Central s’installa alors à Moscou au Kremlin.
Puis, le 3 mars 1918 à Brest-Litovsk, une paix « honteuse » et même caractérisée par Lénine lui-même de « paix obscène », compte tenu des immenses territoires cédés, fut signée avec l’Allemagne.
Après avoir été Commissaire du Peuple aux Affaires Étrangères, Trotski changea de « casquette » pour devenir Commissaire du Peuple aux Affaires Militaires.
Courant février, Trotski se consacra donc à constituer son Armée Rouge Soviétique, dans l’optique de déclencher la Guerre Civile.
Manquant d’officiers expérimentés, Trotski n’hésita pas à recruter 60 000 officiers et 200 000 sous officiers de l’ex-Armée Tsariste, afin d’encadrer ses soldats. Pour un Idéologue Marxiste forcené comme Trotski, il est curieux de constater qu’il acceptait d’encadrer son Armée Rouge, avec ses ennemis jurés. Mais ce serait effectivement mal le connaître, puisqu’il avait pris l’infâme précaution, de garder en « otages » les familles (enfants, femmes, vieillards) de ses officiers. Et en cas de trahison de leur part, il menaçait leurs familles de subir les pires tourments.
Il était également un grand adepte des exécutions sommaires, notamment pour les déserteurs de son Armée Rouge, comme décrit par l’auteur, page 264 :
« Il mettait toujours l’accent sur les résultats pratiques, et demeurait un fanatique de la discipline, capable de décimer les régiments qui désertaient ou faisaient preuve de couardise sous le feu ennemi. Au nombre des condamnés figuraient aussi bien des officiers. »
En juin 1918, débuta alors la politique du Communisme de Guerre : le Sovnarkom (Comité Central du Parti Bolchevique) décréta une « dictature du ravitaillement » interdisant le commerce privé de denrées alimentaires, crime puni par la loi. Et des brigades furent chargées d’effectuer les réquisitions forcées des récoltes agricoles des paysans et des « Koulaks ».
Robert Service nous explique de quelle manière Trotski envisageait sa politique de dictature économique, page 251 :
« Comme tous les camarades communistes, il partait du principe que marchands et spéculateurs ne formaient qu’une seule et même clique ; dans le langage bolchevique, un koulak désignait un paysan plus riche que la moyenne des moujiks du coin. Il ne précisait pas en quoi la suppression du monopole d’État céréalier porterait préjudice à l’économie, surtout si l’approvisionnement dans les zones urbaines en était amélioré. De même, les réserves de textiles devaient être destinées aux pauvres des villages ; il pointait enfin la nécessité de lutter sévèrement contre les paysans riches qui stockaient les céréales, réclamant à leur encontre une peine de dix ans de travaux forcés. »
Ces méthodes Terroristes provoquèrent le déclenchement inéluctable de la Guerre Civile. Lénine et Trotski décidèrent de réprimer toutes oppositions réelles ou supposées, au sein de leur PROPRE PEUPLE.
Des villages entiers subirent un « anéantissement total ».
Tout le Peuple était potentiellement visé, y compris les Communistes eux-mêmes, puisque Trotski en faisait fusiller régulièrement, ce qui choqua les soldats de l’Armée Rouge.
Le 5 septembre 1918 fut instauré par décret : la Terreur Rouge Bolchevique. Felix Dzerjinski responsable de la Tcheka, la sadique Police Politique fondée dès décembre 1917, fut chargé de réprimer impitoyablement les pseudo-« ennemis de classe » : des milliers de personnes issues des classes moyennes et supérieures furent arrêtées, certaines furent immédiatement fusillées, et d’autres gardées en otages.
Cette Terreur aveugle et innommable fut totalement validée par l’autoritarisme intransigeant de Trotski, comme en témoigne ce télégramme confidentiel qu’il envoya à Lénine le 17 août 1918, page 254 :
« Je trouve inacceptable de laisser naviguer sur la Volga des vapeurs battant pavillon de la Croix-Rouge. Charlatans et imbéciles interpréteront la réception de céréales comme le signe de la possibilité d’un accord, et ils en déduiront que la guerre civile n’est pas nécessaire. Les raisons militaires de l’envoi de ce convoi ne me sont pas connues. Pilotes et artilleurs ont reçu l’ordre de bombarder et d’incendier les quartiers bourgeois de Kazan, puis ceux de Simbirsk et de Samara. Dans ces conditions, autoriser un convoi de la Croix-Rouge est tout à fait déplacé. »
Les relations entre, Trotski l’intellectuel condescendant, et Staline le fourbe pragmatique, se tendaient de plus en plus durant la Guerre Civile.
Au plus fort de la Guerre Civile en 1919, Trotski demanda des renforts d’ »unités de la Tcheka fiables à cent pour cent » pour finir d’anéantir les Armées Blanches dirigées par Denikine et Koltchak et les Armées Vertes dirigées par Nestor Makhno et Nikifor Grigoriev.
Pour mener à bien cette répression totale à l’échelle de toute la Russie, voici ce qui fut décidé, page 275 :
« Le Politburo adopta le projet de résolution élaboré par Trotski pour « transformer la Russie soviétique en camp militaire ». Il devait être procédé à un recensement de tous les hommes valides non conscrits pour évaluer leur aptitude au service. L’évacuation de Petrograd serait considérée comme un acte de haute trahison. Trotski promit de « défendre (la ville) jusqu’à la dernière goutte de sang, sans céder un pouce de terrain, et de poursuivre le combat jusque dans les rues. »
De son côté, Staline lui aussi ordonna des exécutions de masse de citoyens de la classe moyenne, « pour l’exemple ». Et comme le précise Robert Service, page 275 :
« Trotski ne fit aucune objection. Parfois, on aurait dit qu’il rivalisait de brutalité avec Staline. »
Le 2 mars 1919 eut lieu dans l’ancien palais de justice du Kremlin, le Congrès pendant lequel, Lénine et Trotski créèrent la 3ème Internationale, Internationale Communiste ou encore Komintern, afin de développer la « Révolution Communiste Mondiale ». Et Trotski termina son discours en déclarant, page 282 :
« Nous sommes prêts à lutter et à mourir pour la révolution mondiale ! »
C’est Trotski qui rédigea le Manifeste de la 3ème Internationale, le 6 mars 1919.
Même le père de Trotski subit la politique Totalitaire Communiste de son propre fils, en se faisant confisquer tout ce qu’il possédait, comme le démontre tristement Robert Service, page 296 :
« Le père de Trotski, âgé, avait quitté le Sud en 1920. Menacé durant tout le temps que dura l’occupation blanche, il ne constata guère d’amélioration avec l’arrivée des Rouges : ses terres furent confisquées et redistribuées à des paysans ukrainiens. Spolié de toutes ses économies, il parvint néanmoins à quitter la province de Kherson et non sans difficultés, il arriva à Odessa. De là, il rejoignit Moscou où il retrouva son fils pour la première fois depuis l’avant-guerre. Il avait alors soixante-dix ans et ne comprenait pas ce qui arrivait au monde qu’il avait connu et dans lequel il avait prospéré : « Les pères triment pour avoir un peu de confort pendant leurs vieux jours, et ensuite leurs fils font la révolution », disait-il. Il eut cependant le courage, même à un âge avancé, de tout recommencer à zéro. Trotski lui trouva une place de gérant dans un moulin près de la capitale. »
En 1920, Trotski écrivit un ouvrage intitulé : Terrorisme et Communisme. Il y décrit distinctement le lien intrinsèquement criminogène entre ces deux dogmes, page 300 :
« Quiconque récuse le terrorisme dans son principe, c’est-à-dire les mesures de répression et d’intimidation à l’égard de la contre-révolution armée, doit également rejeter la notion de suprématie politique de la classe ouvrière et sa dictature révolutionnaire. Quiconque récuse la dictature du prolétariat désavoue en même temps la révolution sociale et creuse la tombe du socialisme. »
Un corpus idéologique qui démontre ignominieusement que : « La fin justifie les moyens », célèbre leitmotiv à caractère Terroriste de Trotski et qu’il s’est efforcé d’appliquer à la lettre, tant qu’il a eu le Pouvoir. Il aurait donc tragiquement continué à imposer la Terreur à son Peuple, s’il avait conservé ce Pouvoir Absolu à la place de Staline !
Ayant mis la Russie à feu et à sang, par : la Guerre Civile, le Communisme de Guerre, la Terreur Rouge, Trotski écrivit un jour sarcastiquement en connivence avec Lénine, page 301 :
« Je me souviens, écrivit Trotski quelques années plus tard, que Lénine et moi en avions ri, mais d’un rire amer, car ce royaume de la liberté était régi par la famine et le typhus. »
Trotski faisant effectivement allusion ici, à la gigantesque famine de 1920 – 1921 engendrant la mort de 5 000 000 de Russes, et principalement due à la politique Terroriste du Communisme de Guerre.
Contrairement à une autre légende largement répandue sur le soi-disant parti pris de Trotski pour les ouvriers, en réalité, un autre de ses célèbres écrits porte sur : « La Militarisation du travail ».
Pour faire court, dans un soucis d’efficacité et de productivité (puisqu’il était un adepte du Taylorisme), il voulait supprimer les droits syndicaux et organiser une discipline militaire sur les lieux de travail, en constituant des « armées de travail » (confer à ce sujet, l’excellent ouvrage d’Orlando Figes La Révolution russe : 1891-1924 : la tragédie d’un peuple Tome 1 et La Révolution russe : 1891-1924 : la tragédie d’un peuple Tome 2).
Le 2 mars 1921 eut lieu l’insurrection de la garnison des marins de Cronstadt, ceux-là mêmes qui avaient aidé les Bolcheviques à fomenter le coup d’État d’Octobre 1917. Ils ne supportaient plus les réquisitions forcées de céréales, dénonçaient la pauvreté, la famine et la maladie qui se répandaient à travers toute la Russie et l’Ukraine, réclamaient des élections libres, etc..
La force militaire des marins de Cronstadt, représentait la dernière grande menace pour l’État Totalitaire Communiste, alors en formation.
Le 5 mars, Trotski chargea donc le commandant en chef suprême de l’Armée Rouge, Sergueï Kamenev, sous la direction du Général Toukhatchevski, d’écraser l’insurrection dans l’ »oeuf ».
Ce massacre fit encore des milliers de morts, et des milliers de déportés en camps de travail.
Cet « épisode » sanglant fut celui qui pesa le plus, toute sa vie, sur la réputation de Trotski. D’autant plus qu’il proféra ultérieurement des mensonges, en voulant faire croire d’une part, que les insurgés de 1921 n’étaient pas les mêmes que ceux qui avaient participé au coup d’État d’Octobre 1917, et d’autres part, en les accusant d’être à la solde des Armées Blanches.
Trotski se déclara satisfait du travail de Toukhatchevski, et Lénine qualifia la mutinerie de Cronstadt de « contre-révolution de petits bourgeois ».
A l’été 1921, ce fut au tour de la province Russe de Tambov de subir les foudres de la Terreur Rouge Bolchevique. Trotski et Toukhatchevski écrasèrent à nouveau, dans la barbarie, la révolte paysanne de Tambov.
En 1921, le Peuple Russe étant exsangue, Lénine mit en place la Nouvelle Politique Economique (N.E.P.) qui suspendait provisoirement le Communisme de Guerre, mais absolument pas la Terreur Rouge. Trotski en tant que « puriste », était contre cette espèce de pseudo retour momentané, à une sorte de système…, Capitaliste.
En 1922, Lénine nomma Staline Secrétaire Général du Comité Central du Parti Communiste d’Union Soviétique (P.C.U.S.).
Toujours en 1922, Lénine s’attaqua ensuite à la religion et plus particulièrement à l’Église Orthodoxe Russe. En effet, dans un pays Totalitaire, il ne peut exister qu’une seule « croyance ». En U.R.S.S. : c’était le Communisme.
Il ordonna la saisie des trésors ecclésiastiques ainsi que l’exécution des évêques.
Au cours du mois de juin, la Tcheka déporta des dizaines de : philosophes, écrivains et intellectuels, en bateaux vapeurs loin de la Russie. Comme pour toutes les répressions, Trotski approuva ces décisions de Lénine. Robert Service résume parfaitement la situation, page 330 :
« Le message était clair : les communistes s’employaient à mettre le pays en quarantaine, politique, idéologique et culturelle. »
D’ailleurs, tous les « ennemis du peuple » imaginaires du régime paranoïaque Communiste, et notamment les opposants politiques comme les Mencheviques, les prêtres, les « bourgeois », les ouvriers grévistes, les « Koulaks » et de manière générale toutes les « personnes de l’ancien temps », du « Peuple ancien » à reconditionner ou à exterminer, furent envoyés en camps de concentration et camps de travail, dès 1918. Puis à partir de 1923, ils furent déportés dans l’immense camps de concentration de l’Archipel des îles Solovki.
Puis à la mort de Lénine le 21 janvier 1924, ce fut la course au Pouvoir Absolu entre Trotski et Staline. L’indécrottable suffisance de Trotski fit qu’il ne se sentait pas menacé par celui qui, page 335 :
« A ses yeux, Staline serait toujours un politicien médiocre et une nullité intellectuelle ».
Mais Staline était plus rusé, calculateur et conservait une rancune à mort contre Trotski, depuis déjà plusieurs années.
Trotski fut exclu du Politburo en octobre 1926. Pourtant en juin, il y déclarait encore son adhésion inconditionnelle au Parti Communiste, page 391 :
« Camarade Dzerjinski, tu le sais bien, je ne crains pas d’instaurer le règne de la terreur, mais nous ne pouvons le faire qu’en tant que parti. »
Puis, en octobre 1927, Trotski fut exclu du Comité Central.
En 1928, il fut contraint à l’exil. Jusqu’à sa mort en 1940, il s’exila avec Natalia Sedova, dans plusieurs pays, jonglant entre les accords d’asile provisoires des États et ses expulsions régulières. Ils vivaient paisiblement et confortablement grâce au talent d’écrivain de Trotski, des articles qu’il publiait et de ses nombreux livres.
En 1933, il réussit à s’installer en France à Barbizon, prêt de Fontainebleau. Suite à la Grande Dépression de 1929, la France traversait elle aussi des difficultés économiques, sociales, et politiques. De plus, la menace du Nazisme se précisait avec l’élection de Hitler en tant que Chancelier de l’Allemagne, le 30 janvier 1933.
Faisant de l’ »entrisme » dans les Partis politiques et les syndicats, Trotski rêvait déjà, peu de temps avant la constitution du Front Populaire en 1936, d’un coup d’État à Paris. Mais, après les échecs répétés de putschs en Allemagne, entre 1919 et 1923, décidés dans le cadre de l’Internationale Communiste, devenant prudent, il estimait que les Communistes Français n’étaient pas encore suffisamment organisés en « comités et conseils d’usines » pour pouvoir déclencher une grève générale. Et de toute manière, il fut expulsé de France dès juin 1935.
Après avoir été expulsé de nombreux autres pays durant ses dix années d’exil, le Président Lazaro Cardenas accorda à Trotski, le droit d’asile au Mexique, fin 1936.
Natalia Sedova et Trotski furent donc hébergés par les artistes peintres Diego Rivera et son épouse Frida Kalho, à Coyoacan en banlieue ouest de Mexico.
La 4ème Internationale fut fondée en septembre 1938, à Périgny, dans la banlieue parisienne, en l’absence de Trotski ne pouvant pas quitter le Mexique.
Globalement, durant tout son exil, Trotski soutint la politique Stalinienne, même s’il existait certaines divergences portant principalement sur la forme, mais certainement pas sur l’immuable dogme, idéologique Communiste.
Puis il mourut le 21 août 1940 à l’hôpital, après que Ramon Mercader, agent du N.K.V.D. (la Police Politique Stalinienne) lui ait planté un piolet de montagne dans le crâne.
Pour conclure :
Robert Service tente de répondre à la grande question qui restera éternellement en suspens, consistant à savoir si Trotski aurait fait perdurer le système Totalitaire, s’il eut été à la place de Staline ?
Voici sa réponse, page 455 :
« Aurait-il employé les mêmes méthodes que Staline s’il avait gagné la bataille pour le pouvoir suprême ? Il est difficile de croire qu’il n’aurait pas combattu la résistance avec la plus grande sévérité. La violence participait des exigences de sa politique. »
Trotski n’avait aucune volonté de se remettre en question. De sa vie, il n’a jamais envisagé la possibilité de se tromper. Sa seule motivation dans l’existence était de préserver, reproduire et faire perdurer le système Totalitaire Communiste réel, qu’il avait grandement contribué à mettre en place avec Lénine, Staline et les autres Bolcheviques.
D’ailleurs, peu de temps avant son assassinat, voici ce qu’il écrivit, le 27 février 1940 dans son testament, page 533 :
« Je mourrai révolutionnaire prolétarien, marxiste, matérialiste dialectique et, par voie de conséquence, athée endurci. Ma foi dans l’avenir communiste de l’humanité n’est pas entamée, elle est même plus forte aujourd’hui qu’au temps de ma jeunesse ».
Il faisait totalement abstraction de la notion de moralité, car selon lui, seul le Marxisme tel qu’il l’avait appliqué, relevait incontestablement de la « Vérité Absolue ».
Jusqu’à sa mort, Trotski fut totalement dépourvu d’Humanité, son déterminisme ou plus exactement son fanatisme Idéologique Communiste, resta son unique obsession jusqu’à son dernier souffle de vie. De plus, on ne trouve aucune trace (parmi sa foultitude d’écrits) de la moindre compassion et encore moins de remords, envers les 10 000 000 de morts civils et militaires engendrés par la mise en place de son régime Totalitaire Communiste, entre octobre 1917 et 1924 ; bien au contraire, dans ses écrits, il justifiait l’impérieuse nécessité du recours à la Terreur de masse !
Pour Trotski, tuer au nom de son Idéologie de : la « Lutte des classes » par la « Dictature du Prolétariat » était donc normal et relevait même d’une absolue nécessité. C’est cette Haine aveugle, froide et déterminée qui fait basculer un homme, un être humain…, du côté de l’Inhumanité et de la Barbarie.
Pourtant, aussi incroyable que cela puisse paraître, Trotski est représenté encore de nos jours, en véritable gourou pour de nombreux Communistes, et pour beaucoup d’entre eux, son assassinat l’a même « sanctifié » au rang de martyr.
Confer également, l’excellent ouvrage de Nicolas Tandler « Qui suis-je? » Trotski.
Détails sur Trotski
Auteur : Robert Service
Editeur : Perrin
Nombre de pages : 624
Isbn : 978-2262034535